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Vainqueurs des quatre éléments
Petit parcours biblique
Que peuvent bien avoir en commun Elie, Jérémie, Joseph, Jonas, Moïse, Shadrak, Méshak et Abed-Négo (les trois jeunes compagnons de Daniel) ? D’abord d’être prophètes, bien évidemment, en ce qu’ils ont parlé au nom de Dieu. Mais aussi d’avoir été chacun plongé dans l’un des quatre éléments et y avoir survécu. L’air pour Elie, la terre pour Jérémie et Joseph, l’eau pour Jonas et Moïse, le feu pour les trois jeunes gens.
L’air – Elie (2R 2,1.11-12)
L’épisode de l’ascension d’Elie se trouve au deuxième livre des Rois. Il s’agit non seulement d’un voyage au travers de l’air, mais plus spécifiquement dans une tornade. La tornade n’est pas un simple coup de vent, elle nous place en danger de mort. Or Elie traverse, indemne, l’élément « air » déchaîné pour monter au ciel et continuer d’assister Elisée.
La terre – Jérémie (Jr 38,4.6-13)
Sur ordre des princes, Jérémie est jeté dans la citerne du fils du roi. Ce fils s’appelle Malkiyyahou, c’est à dire « Le Roi est Dieu ». On nous dit non seulement que Jérémie est enfermé dans sa citerne – ce qui arriva également à Joseph, on s’en souvient (Gn 37,24) – mais qu’en plus le fond de la citerne contient de la vase, de la boue dans laquelle Jérémie commence à s’enfoncer. La terre représente un danger mortel pour lui, dès ce moment. C’est le kushite Ebed-Mélek – dont le nom signifie « Serviteur du Roi », au passage – qui va l’en tirer et le sauver.
L’eau – Jonas (Jon 2)
On connaît l’histoire de Jonas englouti par « un gros poisson » nous dit le texte, et qui demeure trois jours dans ce tombeau, entouré d’eau, implorant le Seigneur. Mais le texte insiste non pas sur le poisson mais bien sur l’eau. C’est l’eau qui représente le réel danger, pour Jonas. Il le dit bien au verset 4 : « Tu m’as jeté dans le gouffre au coeur des mers où le courant m’encercle ; toutes tes vagues et tes lames déferlent sur moi. » Jonas sera rejeté sur la terre ferme, sain et sauf. On pense aussi, bien sûr, à Moïse qui fut non seulement mis en danger dès le début de sa vie par les flots du Nil (Ex 2,1-9), mais ensuite amené à traverser l’eau de la Mer des Roseaux pour en ressortir vivant et vainqueur (Ex 14,21-31).
Le feu – les trois jeunes gens (Dn 3)
C’est encore un roi, Nabuchodonosor, qui prononce la sentence de mort sur les trois jeunes compagnons du prophète Daniel, Shadrak, Méshak et Abed-Négo (noms chaldéens, leurs noms hébreu, cités dans leur cantique, étant Ananias, Azarias et Misaël). Parce qu’ils ont refusé de se prosterner devant la statue d’or d’un dieu païen, Nabuchodonosor les fait jeter dans la fournaise. On nous précise qu’elle était si ardente qu’elle tua des Chaldéens qui se trouvaient à proximité (v.48). Les trois jeunes gens s’y promènent tranquillement, allant jusqu’à entonner leur désormais célèbre cantique d’action de grâce, avant d’être retirés du feu.
Nabuchodonosor prononce alors lui aussi une parole d’action de grâce, parole qui peut conclure les quatre épisodes que nous venons de présenter : « Les signes et les prodiges que le Dieu très-haut a faits à mon égard, j’ai jugé bon de les exposer : ses signes, comme ils sont grands, et ses prodiges, comme ils sont puissants ! Son règne est un règne éternel, et sa souveraineté va de génération en génération. » (Dn 3,32-33)
Et Jésus ?
Jésus, le Messie qu’annonçaient les prophètes, a-t-il lui aussi traversé un des éléments ? Non seulement un, mais il s’est véritablement montré maître des quatre !
L’eau, bien sûr : il y est plongé par Jean-Baptiste, tout d’abord. La mort n’est certes que symbolique dans cet épisode. Mais que dire de la tempête apaisée, de la marche sur les eaux, et de la pêche miraculeuse ? Autant d’épisodes où Jésus dompte un élément hostile mais, en plus, en retire de la vie ! Jésus dort dans la barque, pendant la tempête, et les disciples ont peur. Or Jonas dormait lui aussi au fond du bateau, avant d’être jeté à l’eau par ses compagnons motivés, eux aussi, par la peur.
Le feu ensuite, celui qui traverse son visage sur le mont Tabor, lors de l’épisode dit de la « transfiguration ». Un épisode en présence de trois disciples, Pierre, Jacques et Jean, qui peuvent évoquer en nous les trois jeunes compagnons de Daniel.
La terre du tombeau dans lequel il va passer trois jours, comme Jonas dans son tombeau marin, avant d’en ressortir vivant, ressuscité, amenant une nouvelle donnée de vie, là encore.
L’air, enfin, que Jésus traverse lors de son Ascension au ciel, tout comme Elie.
Le Messie montre qu’il maîtrise pleinement la création, assumant ainsi totalement en sa personne ce qu’avaient préfiguré les prophètes de la première Alliance.
Vincent Lafargue
Publié dans « Ecritures », 2015-1
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