Femmes soumises, vraiment ?

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Homélie pour la Sainte Famille, année A

Siracide 3,2-14 / Psaume 127 / Colossiens 3,12-21 / Matthieu 2,13-15.19-23

« Femmes, soyez soumises à vos maris ! »

Aaaah, voilà un verset qui énerve, et que nous venons de ré-entendre dans la deuxième lecture.

Quand la Parole de Dieu nous énerve c’est toujours intéressant. Comme les prophètes, presque toujours persécutés parce qu’ils énervaient les dirigeants, ce qui agace ou énerve a peut-être quelque chose à nous dire si on veut bien creuser un peu le message.

En général pourtant, on s’arrête d’écouter à ce moment-là. L’Evangile qui suit peut être absolument superbe, vous Mesdames vous n’écoutez plus parce que vous êtes choquées, et vous, Messieurs, vous n’écoutez plus parce que vous vous dites « ça c’est bien vrai, mais si je le dis trop fort en rentrant de la messe, je vais encore dormir sur le canapé »…

Et vous avez bien raison…

…Mesdames !

(Vous avez eu peur que je donne raison aux hommes, hein ?)

Vous avez bien raison parce que nos traductions francophones de cette belle lettre aux Colossiens sont assez catastrophiques.

Le verbe qui est utilisé par Paul n’a rien à voir avec la soumission esclavagiste qu’il nous suggère en français. Cela voudrait plutôt dire « que chacun soit à sa place, ordonné à l’autre, sub-ordonné ce qui ne veut pas dire « sous les ordres de l’autre », ça ce serait de l’esclavage, mais bien plutôt complétant l’autre de telle manière que chacun ait sa place.

« Vous, les femmes, soyez complémentaires de vos maris, » ce serait la traduction la plus proche à faire en français.

Encore que certaines féministes trouveraient encore le moyen de me dire qu’être un simple complément c’est quand même un peu réducteur ! Et même au loto, être le numéro complémentaire, c’est un peu être la dernière roue du carrosse…

Non ! « Complémentaire » au sens de se compléter l’un l’autre, au sens d’une égalité.

Ceci étant dit… les mêmes féministes que j’entends si souvent traiter Paul de mysogyne ou de gros macho perdent un bonne occasion de se taire, concernant ce texte. Parce que Paul y est BEAUCOUP plus exigeant… avec les hommes !

Là encore nos traductions françaises sont mauvaises. On dit, dans notre version, que les hommes doivent « aimer » leurs épouses.

Et vous vous dites, Mesdames : « Facile, ça ! Ha ! Ils n’ont qu’à nous aimer !« 

Oui, seulement, en français, on AIME le chocolat, on AIME son frère ou sa soeur et on AIME son mari ou son épouse, comme d’ailleurs on AIME skier ou on AIME se reposer.

Vous savez que notre langue est une des plus faibles au monde concernant cette notion d’amour, puisque nous n’utilisons qu’un seul et même verbe pour toutes ces actions, pour toutes ces amours si différentes.

Forcément, « Et vous, hommes, aimez vos épouses »… si c’est comme on aime le chocolat, vous reconnaîtrez qu’il y a mieux.

Même si je connais des gens qui adooorent le chocolat. Moi, par exemple. Bref.

En grec, et Paul manie trop bien cette langue pour qu’on puisse l’accuser d’avoir mal choisi ses mots, il y a plusieurs manières de dire l’amour, et le verbe aimer. En général, pour les sentiments humains même amoureux, on utilise le verbe philô. Racine que l’on retrouve dans de nombreux termes français. Un philosophe, par exemple, c’est celui qui aime la sagesse, un philanthrope celui qui aime ses frères et soeurs en humanité.

Mais ici on a le verbe agapô qui revêt l’idée d’un amour infini, l’amour de charité, l’agapè, l’amour qui va jusqu’à donner sa vie pour l’autre.

Je reprends donc, avec le décodeur cette fois : aux femmes Paul demande d’être égales, complémentaires de leurs époux pour que les deux soient bien ordonnés, aux hommes Paul demande d’aimer leurs épouses jusqu’à donner leur vie pour elles.

Ça calme, chères amies féministes, non ?

Reste que, bien entendu, le contexte de l’époque est important aussi, et l’on sait bien à quel point l’épouse avait moins de droits à l’époque qu’aujourd’hui, on sait bien que l’égalité était moins aboutie qu’aujourd’hui.

D’ailleurs pour voir si, Mesdames, vous acceptez pleinement l’égalité si chèrement acquise aujourd’hui, on pourrait renverser les phrases de Paul et les appliquer aux deux. « Maris, soyez complémentaires de vos épouses, femmes, soyez prêtes à mourir pour vos maris. »

Ça fait bizarre, Mesdames, hein ? C’est là qu’on voit à quel point la phrase de départ était gentille avec vous, et exigeante avec vos maris. Quand on inverse ça nous fait tout drôle ! Encore que je connaisse bien des femmes qui non seulement sont prêtes à mourir pour leur maris mais qui se tuent littéralement pour eux. Mon propos n’est évidemment pas contre les uns ou les autres.

Paul dit d’ailleurs que le plus important c’est que, « par-dessus tout, il y ait l’Amour« .

En ce dimanche où nous célébrons la Sainte Famille, recherchons d’abord l’égalité, la complémentarité. Puis creusons l’Amour, le vrai. Et mettons-nous, pour cela, à l’école de Paul, dans ce qu’il nous disait au début de cette même lecture. Revêtons nos coeurs de tendresse, de bonté, d’humilité, de douceur, de patience…

Et puis respectons nos familles, nos ancêtres, soutenons nos aînés comme nous le suggérait Ben Sirac dans la première lecture.

Et par-dessus tout, soyons remplis d’espérance comme Joseph et Marie dans l’Evangile, confiants malgré la précarité de leur situation, attentifs aux signes que Dieu nous donne parfois par les rêves.

Protégeons nos familles, nos enfants, nos petits-enfants. Soyons prêts à donner nos vies par amour pour les nôtres.

Alors, et alors seulement, nous aurons compris le message de Paul, alors nous aurons fait un pas de plus pour respecter la dignité de nos familles.

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Chermignon d’en Haut, 28 décembre 2013, 18.30

Lens, dimanche 29 décembre 2013, 9.30

Montana-Village, 29 décembre 2013, 11.00

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  1. bernard besse

    Mais, nous avons entendu mille fois ce texte – mais aujourd’hui j’en suis bouleversé. Que vais-je en faire? A 75 ans et 54 ans de mariage (avec la même épouse là est ma chance) il me reste encore du chemin à faire …pour aimer, pour respecter, pour admirer et pour me laisser aimer.

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