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Homélie pour la Veille de Noël
Isaïe 62,1-5 / Psaume 88(89) / Actes 13, 16-17.22-25 / Matthieu 1,28-25
> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :
Chers Amis,
J’ai tapé Dieu tout à l’heure. Sur mon ordinateur, hein, je vous rassure, qu’alliez-vous imaginer !?
J’ai tapé « Dieu » sur Google, pour savoir ce que ça me dirait…
Le principal moteur de recherche d’internet m’indique aujourd’hui qu’il y a environ 193 millions de pages qui parlent de Dieu, c’est pas mal…
Et la première, la première d’entre elles qui m’était proposée, c’est la définition de Dieu sur Wikipédia. Je vous lis la première phrase, si vous comprenez quelque chose, vous me faites signe :
« Dieu désigne un être ou une force suprême structurant l’univers ; il s’agit selon les croyances soit d’une personne, soit d’un concept philosophique ou religieux ; principe fondateur dans les religions monothéistes, Dieu est l’être suprême, unique, transcendant, universel, créateur de toutes choses, doté d’une perfection absolue, constituant le principe de salut pour l’humanité et qui se révèle dans le déroulement de l’histoire. »
Point.
Vous avez compris quelque chose ? Peut-être que vous avez compris deux-trois trucs, mais… si vous avez l’impression de ne pas avoir compris grand-chose, c’est normal. Surtout en ce moment… on a l’esprit à la fête, c’est pas tout à fait idéal pour se farcir une définition du dictionnaire, vous êtes d’accord.
Alors, comme théologien je pourrais tout à fait passer une heure à vous expliquer cette phrase, que des gens très savants ont élaborée et qui est très juste, de fait.
…Rassurez-vous, je ne vais pas le faire !
Mais ce n’est pas vraiment ça, notre Dieu, encore moins ce soir !
Ce n’est pas une série de concepts tous plus incompréhensibles les uns que les autres !
Dieu n’est pas livré avec un tube d’aspirine pour qu’on puisse le comprendre, non.
Si vous regardez une crèche, Dieu c’est un petit bébé, c’est un enfant.
D’ailleurs Jésus nous a dit qu’il fallait redevenir comme des enfants si nous voulions un jour entrer dans le Royaume de Dieu. Et à mon avis c’est aussi le signe que, pour le comprendre, il serait peut-être pas mal de redevenir des enfants.
Alors j’ai demandé à Google ce que les enfants disent de Dieu. Voici quelques réponses :
– Cher Dieu, dit Jérémie, je suis canadien ; et toi, tu viens de quel pays ?
– Cher Dieu, dit Nanette, ça doit être difficile d’aimer tout le monde ! On n’est que quatre dans ma famille, et moi je n’y arrive déjà pas.
– Cher Dieu, écrit Michel, Si tu me regardes bien à l’église, dimanche prochain, je te montrerai mes nouvelles chaussures que j’ai reçues à Noël.
– Cher Dieu, dit Dominique, à l’école, on m’a dit que c’était Edison qui avait inventé la lumière. Mais au catéchisme, on m’a dit que c’était toi. Je parie qu’il t’a piqué l’idée.
Et cette dernière que je trouve magnifique :
– Cher Dieu, s’il te plaît, ne me fais pas grandir. Parce qu’on m’a dit aujourd’hui que ta maison appartient aux enfants ! »
Je connais une personne qui habite dans la vallée, qui, quand elle était petite, se mettait toujours à la fenêtre pendant les orages et elle souriait vers le ciel. Elle pensait que Dieu prenait des photos, et elle voulait être sur la photo pour que Dieu n’oublie pas son visage, parce que, disait-elle, « il a tellement de visages à retenir, j’aimerais qu’il n’oublie pas le mien… »
La fille d’un cher couple d’Amis, Zoé, a parfaitement compris Dieu, elle aussi. Elle était l’autre jour dans le salon, chez eux, toute seule. Et elle faisait des bisous en l’air, comme ça… […] Sa Maman arrive et lui dit : « Zoé, tu fais quoi exactement ? » Et la petite de lui répondre : « Bah ça se voit : je fais des bisous. » – « Oui d’accord mais à qui ??? » – « A Jésus ! Comme il est partout… » Elle a compris.
Dieu est venu parmi nous, Chers Amis, pour que nous comprenions ce genre de choses, pour que nous comprenions qu’il est là, qu’il ne nous quitte plus, que nous pouvons invoquer sa présence.
Et au moment de Noël, à la messe comme ce soir, quand il y a des enfants qui sont là et puis que ça fait un petit peu de bruit, eh bien j’aime bien me rappeler que Jésus a été enfant.
…Par contre, il n’a jamais été vieux, hein !
Donc si vous voyez une personne âgée qui fait « Shhhhhhhht ! », vous pourrez lui redire. Dieu, il a été comme ça [montrant un petit enfant], par contre, il n’a jamais été âgé, non.
Dieu est venu parmi nous pour que nous comprenions qu’il est parmi nous à chaque fois qu’on l’invoque…
Un autre enfant un peu plus tard m’a dit avoir compris la même chose à travers le Notre Père. C’était lors d’un camp d’été avec des jeunes. Il n’était pas bien grand, il avait 6 ans, ce petit garçon. Et il m’a demandé : « Vincent, c’est quoi, les Cieux ? ».
On venait de prier le Notre Père… « Notre Père qui est aux CIEUX… » Et il m’a dit : « C’est quoi, les Cieux ? »
Alors je lui ai dit que c’était un autre mot pour dire « le ciel ».
Il a eu l’air songeur quelques secondes, et puis il m’a dit : « Mais… mais… le ciel… ça commence juste là, juste au-dessus du sol ? »
Je lui ai dit « Oui, tu as raison. Le ciel, ça commence juste au-dessus du sol. Toi, tu es dans le ciel, il n’y a que tes pieds qui touchent le sol, mais le reste, effectivement, c’est dans l’air, dans le ciel. »
Son visage s’est illuminé d’un sourire et il s’est exclamé : « Mais alors… quand on dit ‘Notre Père qui es aux Cieux’, c’est qu’il est là, avec nous ! »
Vous voyez, je ne peux plus du tout prier le « Notre Père » sans penser à ce petit garçon. Il avait compris quelque chose de très juste. Il avait compris que Dieu est là, autour de nous, parce que le ciel, ça commence là, effectivement, juste au-dessus du sol.
La logique des enfants, chers Amis, c’est magnifique ! Et cette logique nous apprend beaucoup plus de choses sur Dieu que bien des théologiens et leurs phrases compliquées.
« Théologien » – « Theo » c’est Dieu, « Logos » c’est la Parole – ça veut dire « celui qui sait parler de Dieu ». Eh bien à mon avis il y a des enfants qui sont de très grands théologiens, qui parlent très bien de Dieu.
Nous, les adultes, il arrive qu’on se prenne pour Dieu… Quand on dit « Non, non, je m’en sortirais tout seul ! Pas besoin d’aide, tout va bien ! »
A Noël, Dieu inverse les valeurs. C’est Dieu qui se prend pour un enfant, et pas l’adulte qui se prend pour Dieu…
Il nous invite à inverser notre regard, notre vision des choses. A regarder le monde au travers des yeux d’un enfant.
Et les lectures que nous avons entendues il y a quelques minutes utilisent des mots que les enfants comprennent très bien. Des mots simples.
Le prophète Isaïe, dans la première lecture, parlait d’une couronne brillante. Regardez les enfants quand ils jouent à la princesse, au roi… ils savent très bien ce que c’est qu’une couronne brillante.
Il parlait de justice – les enfants sont très sensible à la justice, et à l’injustice aussi !
Isaïe parlait de nous épouser, les enfants comprennent très bien ça. Il y en a un, quand il regardait ma bague, l’autre jour, il me disait : « Ah, ben toi, tu as épousé Dieu ! » Oui, c’est ça !
Le psaume que je vous ai chanté parlait de lumière, d’amour, de joie, d’alliance. Ce sont des mots simples, notre Dieu est très simple.
La deuxième lecture parlait de promesse – les enfants sont attentifs quand on leur fait une promesse, on a intérêt à la tenir ! – de Sauveur… regardez les enfants jouer au Sauveur, avec leurs costumes de Superman, ils adorent ça ! Un jour, un enfant m’a dit : « Jésus c’est comme Superman, mais en vrai. » C’est vrai, il avait bien compris !
Enfin, l’Evangile nous racontait encore une fois cette histoire que nous connaissons presque par cœur et que les enfants ne se lassent pas d’entendre, pour peu qu’on la leur raconte, bien sûr. Marie, Joseph, l’Esprit Saint, ce bébé qui vient, on ne sait comment, l’Ange, l’immense amour de Joseph pour Marie.
Et puis suivront ensuite, dans le texte que nous entendrons cette nuit, dans les messes de minuit, Bethléem, le recensement, la mangeoire parce qu’il n’y avait pas de place ailleurs, les bergers, les animaux, la grande lumière, les anges, l’étoile, la crèche…
Regardez un enfant devant une crèche. Et écoutez ce qu’il a à vous dire… vous serez surpris.
Il y a quelques années en arrière, devant une crèche en-bas à Sion, j’ai vu un adulte qui essayait d’expliquer aux enfants ce qu’ils avaient sous les yeux. C’était pathétique.
Il expliquait que, « bien sûr, c’est une crèche, mais que c’est pas vraiment la même que celle de Bethléem, Bethléem c’est tout loin, là-bas, d’abord celle-là, elle est plus petite, et puis c’est une crèche moderne, et puis à l’époque c’était différent, il n’y avait pas les même maisons, et il y avait des personnages, mais ce n’était pas tout à fait les vrais, en fait ils représentaient les vrais personnages, mais c’était symbolique… »
Et puis il s’est retourné vers les enfants et il leur a dit : « Vous savez ce que ça veut dire, symbolique ? »
En trois phrases il avait tellement embrouillé le mystère de Noël qu’une petite fille a eu pitié de lui. Elle l’a regardé, elle lui a souri, elle lui a dit : « Mais… bien sûr que si, c’est la vraie crèche ! Parce que tu sais, Dieu, il a sa maison partout. Alors celle-là aussi, c’est sa maison. »
Il suffit de laisser parler les enfants et tout devient simple, même avec Dieu.
Parce que Dieu, à Noël, chers Amis, c’est pas une définition de Wikipédia ou un concept d’adultes, c’est un enfant. Et il nous faut nous en souvenir.
Alors aide-nous, Seigneur, à redevenir comme les enfants pour mieux te comprendre avec la pureté du cœur, pour mieux t’aimer simplement, pour mieux nous émerveiller devant le mystère de ta présence parmi nous, cette nuit encore !
Amen.
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Thyon 2000, lundi 24 décembre 2018, 17.30 (version enregistrée)
Et, dans une version bien différente, jadis :
Evolène, 24 décembre 2017, 24.00
Hérémence, 24 décembre 2015, 24.00
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