Deux pièces…

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Homélie pour le 32e dimanche TO, année B

1Rois 17,10-16 / Psaume 145 / Hébreux 9,24-28 / Marc 12,38-44

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

Durant toute mon enfance, j’ai vécu dans quelques dizaines de mètres carrés. Mes trois frères, mes parents et moi-même, nous avons toujours vécu dans un trois pièces et demi.

Mais Genevois, le trois pièces et demi, c’est-à-dire le seul canton de Suisse où la cuisine compte comme une pièce. Il en reste donc deux et demi. Deux et demi pour 6 personnes, j’aime mieux vous dire qu’il vaut mieux s’apprécier et bien s’entendre ! Ce qui fut notre cas. Et sûrement que ça aide, d’ailleurs.

Mais même si mon frère aîné est parti assez vite de la maison, nous étions un peu serrés, c’est vrai. Mes parents n’ayant pas de vraie chambre à eux pendant des années où ils dormaient dans le salon, avant de transformer chaque matin leur lit en joli canapé tous les matins pour que la pièce redevienne accueillante aux visiteurs.

Et des visiteurs, il y en avait ! Mes parents m’ont appris le sens de l’accueil et j’ai vu défiler bon nombre d’amis à la maison. Chaque personne qui sonnait avait droit à du temps, à un bon café, à une écoute, à un peu de chaleur humaine.

Et je crois pouvoir dire qu’on a tous vécu très heureux dans ce petit appartement qu’ils occupent d’ailleurs toujours, en ville de Genève.

Plusieurs de mes confrères, eux, ont de grandes cures, de grands presbytères à leur disposition avec parfois des dizaines de pièces pour eux seuls, les cures ayant été faites, au départ, pour abriter plusieurs prêtres… eh oui… et vu le nombre qu’on est aujourd’hui, forcément… aujourd’hui il y a plus de cures que de prêtres et les maisons de paroisses deviennent beaucoup trop grandes.

Pour ma part, comme je suis aumônier d’hôpital je ne vis pas dans une cure. J’ai la chance d’avoir un logis à ma taille : j’ai un petit deux-pièces proche de l’hôpital où je travaille. Une chambre et un salon avec deux fauteuils pour recevoir. Et ça me suffit largement.

Le pape François lui aussi, vous le savez bien, vit dans un simple appartement de deux pièces. Ça change, là aussi. Et ça fait du bien, je trouve, que l’Eglise évolue peu à peu vers un petit plus de simplicité. Et que ses ministres vivent désormais plus conformément à l’annonce de l’Evangile.

Parce que l’Evangile, et notamment la page que nous avons réentendue il y a quelques instants, nous parle de simplicité.

Cette petite veuve qui donne deux piécettes… et pourtant c’est tout ce qu’elle a… Elle donne de son nécessaire pour Dieu et pour les autres.

Jésus la montre en exemple à son entourage. Et l’entourage de Jésus connaît parfaitement l’autre texte que nous avons entendu en première lecture. L’épisode du livre des Rois, avec cette autre veuve qui donne tout ce qu’elle a pour accueillir un visiteur, le prophète Elie, un homme de Dieu.

Je connais de nombreuses personnes, et il y en a parmi vous, qui ont cette générosité-là, ce sens de l’accueil, qui n’ont peut-être pas grand-chose pour vivre, mais qui en donnent encore pour les autres, y compris s’ils doivent prendre de leur nécessaire.

Ça, c’est une attitude tirée de l’Evangile je crois.

Pour vous reparler un instant de ma famille, nous avions très peu d’argent chez moi. Papa était ouvrier et Maman mère au foyer.

Et je les ai vus, mes parents, mettre de l’argent dans des enveloppes chaque mois. Une enveloppe marquée « vacances »… Une enveloppe marquée « repas »… Une enveloppe marquée « pour les cadeaux des enfants »…

Et je les ai vus chaque semaine empiler soigneusement – il le font toujours d’ailleurs, même à 86 ans – je les ai vus chaque semaine empiler soigneusement des pièces de cinq francs. La plus grosse des pièces… pour la quête, à la messe, le dimanche. Et chaque dimanche, je les voyais partir à la messe avec deux pièces, une chacun, pour les mettre à la quête.

Et pourtant dans certaines de ces enveloppes on comptait les centimes… pas les francs ! Une pièce de cinq francs, c’était précieux. Très précieux. Mais mes parents ont toujours pris de leur nécessaire pour Dieu. Et donc pour les autres puisque, vous le savez, l’argent de la quête est distribué aux personnes qui en ont besoin.

Le trésor de notre foi, je crois, chers Amis, ne se trouve pas dans les vêtements d’apparat… dans les vêtements de ceux qui aiment les salutations, les places publiques, comme le disait Jésus.

Le trésor de notre foi n’est pas non plus dans un temple si beau soit-il. Notre deuxième lecture nous rappelait cela, la lettre aux Hébreux. Le trésor de la foi n’est pas dans du matériel.

On s’est trompé longtemps dans l’Eglise avec l’idée que rien n’était trop beau pour Dieu. On avait des calices en or massif, des vêtements de cérémonie qui valaient des fortunes.

Mais ça n’est pas l’Evangile, ça !

Quand on dit : « rien n’est trop beau pour Dieu », on parle de gestes ! De beaux gestes, de belles attitudes, d’amour, de charité. Dans ce domaine-là, rien n’est trop beau pour Dieu, effectivement. Mais on ne parle pas de compte en banque.

Le temple de Dieu est là-haut, dans les cieux, comme la Jérusalem céleste qui nous attend – nous l’avons chanté au début de cette célébration. Et nous n’y emporterons que l’amour que nous aurons répandu autour de nous.

Les linceuls n’ont pas de poches, comme le dit volontiers le pape François. Nous n’emporterons que ce que nous aurons donné autour de nous.

C’est ça, être chrétien, je crois.

Peu importe ce que l’on a. Mais partageons-le. Soyons toujours prêts à cela, au nom de Jésus.

Amen.

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Champex, 6 novembre 2021, 17.00

Carmel du Pâquier, 7 novembre 2021, 9.00

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