A vous, Mesdames…

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Photo DR : La Venus de Botticelli (Galerie des Offices, Florence)

 

Homélie pour la Solennité de l’Assomption 

 

Ap 11,19a;12,1-6a.10ab / Ps 44(45) /1Co 15,20-27a / Lc 1,39-56 

 

 

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Chers Amis,

 

 

J’entends parfois dire que l’Eglise catholique est misogyne. Vous aussi ? Vous pensez probablement qu’il y aurait encore du boulot chez nous, rapport à l’égalité hommes-femmes dans l’Eglise.

Pourtant… Quand j’en discute un plus plus profondément avec quelques connaissances féminines, en parlant de Dieu et de son Eglise j’en reviens toujours à les étonner.

Par exemple, chez nos ancêtres dans la Foi, les Juifs, pas de baptême, vous le savez. La religion se transmet automatiquement… par la mère – et non par le père. Si vous avez un père juif et une mère chrétienne, vous ne serez pas juif. Si vous avez une mère juive, vous serez juif, de toutes façons. Après, vous pourrez vous convertir à d’autres religions, mais de naissance vous serez juif, c’est ainsi. Jésus est né juif, bien sûr. Ce sont les femmes qui ont ce pouvoir, dans la religion de nos ancêtres. Et l’homme n’y peut strictement rien.

Chez eux, les préceptes concernant les femmes montrent à quel point il s’agit d’êtres sacrés – beaucoup plus que les hommes – notamment parce qu’elles engendrent la vie, parce qu’elles ont cette force en elles.

Ça, c’est chez les Juifs. Bon, mais chez nous ?

Eh bien comme prêtre, je peux vous dire que quand je reçois un couple en vue d’un mariage, ce qui m’arrive assez souvent, en vue d’un baptême ce qui m’arrive tout aussi souvent, ou du catéchisme de leur enfant, eh bien c’est presque systématiquement ELLE qui me parle au départ… C’est presque systématiquement ELLE qui vient me demander cet entretien. Parce que c’est presque systématiquement ELLE qui transmet la Foi, la religion dans son foyer.

Il y a des hommes qui le font très bien, Messieurs, je ne veux pas vous vexer. Mais c’est comme si c’était inscrit dans les entrailles féminines.

Nous savons aujourd’hui que le christianisme s’est maintenu en Russie ou en Chine communistes, par exemple, grâce aux mamans, et aux grands-mamans, qui inlassablement – et de façon cachée et en grand risque – apprenaient les prières à leurs enfants, le chapelet par exemple, pendant que leurs maris allaient faire la guerre pour tuer d’autres êtres humains.

La plupart du temps, lorsque je vois un adulte et un enfant – en dehors de l’heure de la messe – dans l’Eglise, venir allumer une bougie, il s’agit d’une femme. Dans 90% des cas. Une maman ou une grand-maman avec son enfant ou son petit-enfant. Elles refont ces gestes ancestraux, elles les transmettent.

Chez nous aussi, la Foi se transmet bien souvent par les femmes.

Et puis dites-moi… à qui le Ressuscité se fait-il voir en premier ? A des femmes – et à Marie-Madeleine bien sûr. Les Apôtres, c’est pour après. Qui Jésus rencontre-t-il le plus souvent dans les Evangiles ? Des femmes.

Quelles sont les missions que Jésus donne aux uns et aux autres ? A Pierre, il donne la mission de diriger l’Eglise. C’est un maigre hochet que ce pouvoir – et vous mettez ce mot entre de gros guillemets. Demandez au pape François si c’est agréable d’être pape… Et aux femmes, qu’est-ce que Jésus confie ? Il confie la bonne nouvelle et son annonce, mieux, il vous confie, Mesdames, de l’enseigner, de faire progresser les gens dans la compréhension de ce mystère immense qu’est Dieu. D’un côté le rôle crucifiant d’un dirigeant au cahier des charges impossible, et de l’autre le rôle extraordinaire d’être les messagères de Dieu dans chacun de nos lieux de vie, dans nos communautés, dans nos familles.

Mais l’être humain est ainsi fait qu’il envie toujours ce qui lui semble le plus honorable aux yeux du monde, la place la plus en vue. [montrant l’autel] Croyez-vous vraiment, Mesdames, qu’il est plus enviable d’être à ma place à cette table qu’à la vôtre ? J’envie votre place !

Etre serviteur de la communauté, j’en suis très content. Mais est-ce plus enviable d’être serviteur que d’avoir la mission d’éduquer cette communauté, de la faire grandir ?

Combien de femmes engagées dans nos paroisses, par rapport aux hommes ? Le pourcentage est écrasant. Sans vous, les paroisses n’existeraient pas !

Alors oui, je sais, l’être humain est ainsi fait, aussi, qu’il veut toujours la place qui lui est interdite. On est fabriqués comme ça depuis tout petits. Il suffit que les parents nous interdisent quelque chose : on va vouloir le faire, c’est dans nos gênes ! Et du coup, ce qu’on ne peut pas faire comme adulte, on va vouloir se battre pour pouvoir le faire !

Voyons les choses de mon côté alors, Mesdames : au nom de la sacro-sainte égalité revendiquée par tant de féministes aujourd’hui, pourquoi n’aurais-je pas le droit de porter un enfant, par exemple, et de lui donner naissance ? Cela nous est interdit, Messieurs, c’est injuste, non ? Battons-nous contre ce Dieu qui nous interdit quelque chose ! Et le jour où la science nous permettra de façon certaine, ça arrivera, de porter un enfant, c’est l’Eglise qui nous l’interdira. Battons-nous contre cette Eglise qui nous interdit d’être comme les femmes !

Ça sonne un peu ridicule, Mesdames, vous ne trouvez pas ? Pourtant c’est ce genre de messages qu’on entend dans l’autre sens…

Que dire des autres cadeaux que notre Créateur a fait aux femmes ?

A qui a-t-il donné la beauté ? L’immense qualité qu’est la sensibilité ? A qui a-t-il donné le charme d’un sourire à faire tomber un radiateur ?

A qui Dieu a-t-il donné que tout l’Amour du monde soit contenu dans une larme qui coule de vos yeux, Mesdames ?

A qui Dieu a-t-il donné le goût cent fois plus développé que le nôtre ? Demandez aux œnologues, ils le savent bien. A qui a-t-il donné des qualités artistiques d’écriture, de sculpture, d’érudition tellement plus fines que les nôtres ?

A qui Dieu a-t-il confié la grâce, la fragilité, et en même temps une résistance à la douleur – on le sait bien – infiniment plus importante que la nôtre, Messieurs ?

A qui Dieu a-t-il donné la joie, l’honneur immense, de porter son propre Fils ? A un homme ? Eh non. A une femme, Marie.

Enfin, que dire de ce que nous célébrons aujourd’hui, l’Assomption ?

Jésus, lui, est mort. Il a passé trois jours au tombeau. Marie n’a pas connu la dégradation du tombeau. Elle a été élevée au ciel par son Fils – Dieu – qui n’a pas voulu de la froideur du tombeau pour celle qui lui a donné la vie. Le premier être humain à avoir eu cette grâce, c’est une femme.

Et en face, qu’avons-nous Messieurs ? La force de faire la guerre ? Chouette… Souvent le pouvoir en politique ? …même si heureusement cela change… Quand on voit ce que certains soi-disant puissants de notre monde font de leur libido et de leur force physique, permettez-moi d’avoir envie de vomir.

Alors s’il vous plaît… en cette fête de Marie, voyons les choses telles qu’elles sont. Marie est une femme. Une femme de Nazareth. Ce n’est pas une déesse – et il est facile de tomber dans ce travers. Ce n’est pas une déesse, c’est une femme. Avec tout ce qu’une femme a de merveilleux. Si Dieu avait voulu inventer une déesse, il l’aurait fait. Mais non, il a choisi l’une d’entre vous, Mesdames.

Laissez-moi vous le redire : il a choisi l’une d’entre vous, Mesdames. Pas l’un de nous, Messieurs. Et j’aurai beau manifester jusque sous les fenêtres du Pape, jamais je ne pourrai changer cela. C’est l’une d’entre vous qu’il a choisie.

Marie, par ses joies qu’elle exprime notamment dans le prodigieux Magnificat que nous venons de ré-entendre, par ses larmes de mère au pied de la croix de son fils, par sa sensibilité, sa douceur, sa tendresse, par son incroyable force aussi à supporter la douleur de perdre un fils, par son espérance inébranlable, Marie est une femme comme vous, Mesdames. Et jamais je ne pourrai lui ressembler comme vous lui ressemblez. Jamais. Et d’ailleurs je ne le souhaite pas. Chacun son rôle en ce monde. Qu’elle serait triste, l’égalité, si nous nous mettions toutes et tous à être identiques !

Alors prions Marie, chers Amis. Prions-la comme notre Maman de là-haut, comme celle qui vous ressemble, Mesdames, comme celle en qui vit le trésor que Dieu avait placé en Eve, et qu’Adam n’aura jamais. Prions-la, et remercions-la de nous montrer que parmi les institutions sur cette terre qui font honneur aux femmes, il y a – eh oui, aussi – la nôtre.

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Evolène, 15 août 2016, 9.00 (version enregistrée)

Hérémence, 15 août 2016, 10.30

Et dans une version légèrement différente, jadis :

Les Giettes / VS, 15 août 2011

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  1. Hermine Pralong

    Je trouve très belle et très juste ton homélie Vincent. Que c’est vrai que souvent ce sont les grands’mamans qui enseignent la religion et les prières à leurs petits enfants, mais n’oublions pas que sans prêtre ou sans mari, il n’y aurait ni paroisse, ni famille! Marie nous a montré l’exemple, alors continuons à avoir des familles sous la protection de Marie. Moi-même dans mes prières que fois j’arrive à Jésus en priant Marie en premier. Merci Vincent pour tes homélies si bien réfléchies.

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