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Homélie pour la Solennité de Pâques 2020
Ac 10, 34a.37-43 / Ps 117(118) / Col 3,1-4 / Luc 24,13-32
> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :
Chers Amis,
C’est Pâques ! Et il est peut-être bon de se rappeler quelques évidences : le Seigneur est ressuscité, il est vraiment ressuscité ! Ce n’est pas qu’une nouvelle – et quand je dis Pâque’une nouvelle, ce n’est Pâque’un jeu de mot non plus ! – ce n’est pas qu’une nouvelle vieille d’il y a deux mille ans ! C’est une nouvelle neuve à chaque dimanche de Pâques.
Le Seigneur est ressuscité ! Nous avons à l’annoncer autour de nous ! Nous avons à rechercher les réalités d’en-haut, comme le disait Paul dans sa lettre. Nous avons à être nous-mêmes des témoins comme nous le lisions dans les Actes des Apôtres.
J’ai choisi de vous faire ré-entendre l’Evangile du SOIR de Pâques – non pas celui qu’on lit habituellement à la messe du matin mais celui de la messe du dimanche soir de Pâques – que la plupart d’entre nous n’avons aucune chance d’entendre cette année puisque nous ne pouvons pas nous rendre à une messe ce dimanche soir et qu’il y a très peu de messes du soir en streaming, je ne sais même pas d’ailleurs s’il y en a ici autour de nous… j’ai choisi de vous faire entendre cet Evangile que vous n’entendriez pas autrement en ce jour de Pâques 2020, cet Evangile des pèlerins d’Emmaüs qu’on nous propose donc pour le soir de Pâques…
C’est une prodigieuse catéchèse que cet Evangile et on y trouve les sept attitudes chrétiennes de base, dans l’ordre qui plus est, dans l’ordre !
Quelles sont les sept attitudes chrétiennes de base, Chers Amis ? Alors je vous entends penser, peut-être réfléchir à haute voix en famille, parler peut-être d’aimer les uns, les autres, comme il nous a aimés, parler peut-être des commandements, ne pas tuer…
C’est autre chose qui se trouve dans cet Evangile d’Emmaüs. Sept attitudes de base pour rejoindre notre prochain. Sept attitudes de base envers notre prochain.
Et ces sept attitudes, elles nous sont montrées par Jésus le ressuscité, dans cet Evangile précisément, vous les avez entendues à l’instant !
Alors c’est bien difficile de revenir en arrière comme ça dans notre mémoire. Même si sur Internet vous pouvez le faire, bien sûr, avec le curseur…
Mais ne le faites pas, restons ensemble ! Restons ensemble et revoyons ensemble ces sept attitudes de base.
Que fait Jésus tout d’abord ? Eh bien il les rejoint. Vous me direz que ça paraît d’une évidence absolue : si on veut parler à quelqu’un il vaut mieux le rejoindre. C’est vrai !
Il les rejoint… pas n’importe où, il les rejoint sur le chemin qu’ils sont en train de parcourir, ces deux disciples d’Emmaüs, comme on les appelle…
Au passage, vous avez peut-être remarqué qu’un seul des deux est nommé, Cléophas. L’autre, on ne connaît pas son nom, et ce n’est peut-être pas pour rien.
Peut-être – imaginons ! – que Luc ait voulu que Chacune, Chacun de nous, nous nous reconnaissions dans ce deuxième disciple. C’est pour ça qu’il n’a pas de nom, on peut chacun se mettre à sa place.
C’est une suggestion, bien sûr.
Que fait Jésus donc ? Il les rejoint là où ils se trouvent. Sur leur chemin de vie, à ce moment-là.
Première attitude chrétienne, Chers Amis : rejoindre l’autre là où il se trouve, là où il est.
Alors vous allez me dire : « C’est sympa mais en temps de confinement, heu… ben c’est pas possible, hein ! On ne peut pas rejoindre l’autre là où il est. Je ne peux pas, tout à l’heure, sortir aller sonner à la porte de la voisine ici et lui dire ‘Joyeuses Pâques’, c’est pas possible ! »
Mais bien sûr que si, que c’est possible. Avec les moyens que nous avons… il n’y a pas besoin d’internet hein ! Vous prenez le téléphone, vous appelez les gens que vous aimez et vous les rejoignez là où ils sont, c’est tout simple.
C’est tout simple et quel meilleur jour que ce jour de Pâques pour faire cela !
Rejoignons notamment nos aînés, ceux qui sont confinés, ceux qui ont peur chez eux, rejoignons-les par tous les moyens que nous avons. Rejoignons-les là où ils sont.
Première attitude chrétienne : rejoindre l’autre là où il est. Pas là où l’on voudrait qu’il soit. Pas là où nous l’attendons. Là où il se trouve, sur son chemin de vie.
Que fait Jésus ensuite ? Deuxième attitude : il fait route avec eux. Il aurait très bien pu les rejoindre et les croiser, et continuer son chemin. Non. Il fait route avec eux, il prend du temps avec eux.
Alors là aussi, vous allez me dire : « C’est sympa mais comme on est confinés, on ne peut justement PAS faire route, hein, actuellement, avec les gens qu’on aime. La police nous l’a bien dit : on reste chez soi, y compris et surtout en ce week-end de Pâques, on ne sort pas, ce n’est pas le moment d’augmenter les accidents sur les routes. »
Alors comment faire route ? Eh bien là aussi, un petit peu d’imagination ! Quand vous téléphonez aux personnes que vous avez envie de rejoindre là où elles en sont, eh bien prenez du temps.
Ce n’est pas simplement leur dire : « Ça va ? Ouais ça va. Ah ben tant mieux, alors à la prochaine ! » Non. Prenons du temps. Faisons route un moment de notre vie. Que ce moment de notre vie soit aussi un moment de leur vie. Faisons route ensemble, prenons du temps avec les gens que nous rejoignons, c’est la deuxième attitude chrétienne.
Troisièmement que se passe-t-il ? Eh bien Jésus les écoute. Alors vous allez me dire : « C’est peut-être quand même un petit peu évident, là aussi ! »
Non… non, non, il ne commence pas par parler lui. Il les écoute. Il leur pose une question : « Pourquoi est-ce que vous êtes tout tristes ? » Et puis il les laisse parler. Le temps qu’il faut.
C’est ça la troisième attitude chrétienne. Ecouter l’autre… sans vouloir tout de suite lui dire nous, ce qu’on a à lui dire. Ecouter l’autre nous raconter où il en est dans sa vie.
Quatrièmement – et vous noterez que c’est seulement en quatrième que ça se passe ! – quatrièmement Jésus leur explique l’écriture. Il leur explique tout particulièrement que ce ne sont pas des pages poussiéreuses mais que cette Ecriture les rejoint dans leur vie, là où ils en sont, ce jour-là. Que toute l’Ecriture parlait de ce qu’ils sont en train de vivre !
C’est seulement en quatrième, lorsque nous avons rejoint la personne, lorsque nous avons pris du temps avec elle, lorsqu’on a commencé par l’écouter, c’est seulement là qu’on peut lui annoncer le Ressuscité en ce jour de Pâques !
Lui dire : « Au fait, tu sais, aujourd’hui c’est une grande fête ! Et j’aimerais partager cette joie avec toi. Parce que cette fête, elle nous rejoint dans l’aujourd’hui de notre vie ! »
Et là aussi, vous avez beau être confinés, on peut tout à fait le faire. Pas besoin d’aller dans le jardin chercher des œufs, on peut tout à fait annoncer le Ressuscité différemment.
Cinquièmement, que fait Jésus ? Eh bien il se laisse inviter. C’est pas le plus facile, se laisser inviter par l’autre. Alors qu’on a tout de suite envie de dire : « Non là tu sais, heu, là j’ai quelque chose d’autre à faire, je n’ai pas du tout le temps de rester avec toi… j’ai un agenda super-chargé… » – et c’est un homme à l’agenda chargé qui vous le dit Chers Amis !
Remarquez, en temps de confinement, ça c’est un petit peu allégé, nos agendas, il faut reconnaître…
Mais se laisser inviter, même en temps de confinement, c’est possible. D’ailleurs c’est ce que vous avez fait ce matin ! Vous vous êtes laissé inviter par un petit message reçu sur vos téléphones, sur internet, vous vous êtes laissé inviter pour vivre cette célébration avec nous.
Et je pense que c’est très important dans nos vies de se laisser inviter quand l’autre nous invite. « Reste avec nous, disent les disciples d’Emmaüs, il se fait tard… » Et Jésus décide de rester avec eux.
Sixièmement, que se passe-t-il ? Il célèbre. Vous allez me dire : « Ils célèbrent ? On n’a pas vu de messe, dans c’t’histoire-là ! » Non ! Ils prennent le repas ensemble.
Mais tout repas est une célébration, Chers Amis. Nous sommes les disciples d’un repas : le dernier repas que nous avons célébré jeudi soir encore.
Nous sommes les disciples d’un repas, le repas le plus important de notre journée, celui que nous allons prendre à cette table. En même temps que vous communierez par désir, tout à l’heure.
Alors chaque repas devrait être une célébration. Chacun de nos repas de famille. Et tout spécialement celui d’aujourd’hui. Alors que justement nous ne pouvons pas nous rassembler comme nous le faisons habituellement à Pâques.
Enfin je ne sais pas pour vous mais, moi, tous les dimanches de Pâques, on est toujours une bonne quinzaine, voire même plus autour de la table. Eh ben cette année, c’est pas possible !
C’est pas possible, mais pourtant le repas va être une fête. Ce repas, je le prendrai tout seul, chez moi tout à l’heure, mais ce sera une fête, je vous le garantis, ce sera une fête ! Et chaque repas devrait être une célébration…
Que fait Jésus en sixième ? Il célèbre, il mange, il trinque, il célèbre la vie, il prend le repas avec les gens qui l’ont invité. Que ce soit notre attitude aussi.
Septièmement, septième et dernière attitude, la plus difficile certainement… Que fait Jésus alors ? Il disparaît.
Une fois qu’ils ont compris qui ils avaient en face d’eux, parce qu’il a rompu le pain, parce qu’il a prié… il disparaît !
Alors attention, je ne suis pas en train de vous dire « Disparaissez, hein ! Faites appel aux entreprises spécialisées et puis disparaissez… » Non, pas du tout ! Pas du tout, Chers Amis !
Mais savoir disparaître, c’est tout un art, vous savez ! Quand la conversation dure depuis une demi-heure et qu’on commence à échanger des banalités voire même à juger notre prochain, c’est peut-être le moment de raccrocher… c’est peut-être le moment de se dire : « Ouais, là, il serait bon que je disparaisse et que je téléphone à une autre personne qui en a bien besoin aussi ! »
Savoir disparaître… c’est donc ce que je vais faire.
Ces sept attitudes que nous venons de vivre ensemble.
La première ? Rejoindre les gens là où ils sont. C’est ce que nous avons fait ce matin, sur votre écran.
La deuxième : prendre du temps avec eux. C’est ce que nous faisons avec vous, c’est ce que vous faites avec nous.
La troisième : écouter. Alors c’est plus difficile, on ne peut pas vous écouter. Mais vous pouvez écrire dans les commentaires de cette vidéo, vous pouvez écrire ce que vous avez à nous dire, ce sera notre manière de vous écouter.
Quatrièmement : vous dire comment la Bible vous rejoint. C’est ce que je viens de faire avec les pèlerins d’Emmaüs.
Cinquièmement : se laisser inviter. Vous nous invitez chez vous : merci beaucoup.
Sixièmement : célébrer, on va le faire dans un instant avec l’Eucharistie.
Septièmement : savoir disparaître.
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Cure de Bex, Pâques, dimanche 12 avril 2020
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