Le Christ aux Cartes

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Homélie pour le 34e dimanche TO, année B (Christ-Roi)

Daniel 7,13-24 / Psaume 92 / Apocalypse 1,5-8 / Jean 18, 33b-37

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

Chers Amis,

Je vous pose une question pour commencer : est-ce qu’un paysan peut gagner sur un roi ? On a bien sûr envie de répondre « oui » si l’on est paysan ! Et puis même si l’on n’est pas paysan parce qu’on aime bien que le plus petit gagne contre le plus grand, n’est-ce pas ? On y voit une certaine logique évangélique…

Pourtant la simple logique voudrait que l’on réponde « non », évidemment.

Le roi, même si nous n’en avons pas en Suisse, le roi a plus de pouvoirs que le paysan, à priori.

Mais puisque nous fêtons un roi en ce dernier week-end de l’année liturgique, en cette fête du Christ-Roi, posons-nous la question au sujet de notre roi… qui est-il vraiment ? Est-il plus grand que les rois de la terre ? Et d’ailleurs, qu’y a-t-il de plus grand qu’un roi ?

S’il y en a parmi vous qui jouent aux cartes, eh bien ils vous diront qu’évidemment il y a l’As… au-dessus du Roi ! C’est logique, n’est-ce pas ?

Et si vous jouez au Jass, et qu’on joue Atout, alors il y a encore bien plus grand que l’As puisqu’au-dessus se trouvent le Nell et le Bour, à savoir le Neuf et le Valet.

C’est d’ailleurs le seul cas que je connaisse où le valet gagne contre le roi.

Si je vous dis cela, ce n’est pas par hasard, Chers Amis ! Parce que… quand on utilise les termes du Jass, c’est beaucoup plus fascinant ! « BOUR », c’est un mot qui vient du dialecte suisse-allemand. Le mot allemand correspondant est « Bauer »… le paysan !

Au jeu de cartes classique de notre pays, le Jass, le paysan peut gagner contre le roi, si l’on joue atout évidemment.

Je pourrais transposer cela en version républicaine, si nous étions en France. Et vous demander si un gilet jaune a plus de pouvoir qu’un président de la République, par exemple.

Or si vous regardez vos jeux de cartes vous verrez que TOUS les valets ont un gilet jaune ! C’est la couleur du service, traditionnellement. Dans les bandes dessinées de notre enfance, souvenons-nous du gilet jaune de Nestor, le valet du capitaine Haddock.

Il y a donc beaucoup plus qu’une simple symbolique là-derrière…

Les rois de notre terre, les présidents, les politiques qui ont du pouvoir, jouent sans atout.

Leur pouvoir terrestre est symbolisé par toute une série de choses : des couronnes, des sceptres, un palais (même pour un président, notez que l’Elysée c’est un palais…).

Les dirigeants de ce monde ont des serviteurs. En politique on les appelle des ministres. Ils ont souvent de l’argent, une armée, des soldats, de magnifiques limousines qui sont les carrosses d’aujourd’hui.

Mais ils jouent sans Atout ! Il n’y a que l’As qui est au-dessus d’eux. Les As, en termes de pouvoir politique, ce sont les grands ensembles multinationaux qui réunissent plusieurs pays.

Les rois du monde, tout rois qu’ils sont, obéissent à un certain nombre de groupements qui sont au-dessus d’eux.

Les groupements mondiaux sont militaires – ils sont alors des As de pique, l’OTAN par exemple. Ils sont politiques – As de trèfle, l’ONU, par exemple. Ils sont financiers – l’As de carreau qu’est le FMI, par exemple. Ils sont sociaux – l’As de cœur qu’est la Croix-Rouge, par exemple.

Et les rois et les présidents obéissent à ces As. Même si, à la tête de ces grands groupes-là, il n’y a pas toujours des as, je vous le concède…

Mais tout cela est très pauvre. Quand on joue sans atout, tout est joué d’avance, si vous avez les bonnes cartes. C’est beaucoup plus intéressant quand on joue avec Atout.

Et l’Atout, chers Amis, ce qui renverse les valeurs du jeu, c’est la Foi. La Foi change tout, elle met du sel dans la vie, exactement comme l’atout met du sel dans notre tour de cartes. Elle nous donne de croire au bonheur, elle nous aide à donner du sens à ce que nous faisons, à renverser certaines valeurs du monde : non, ce n’est pas l’As qui gagne ! Quand on joue atout, c’est le paysan, le Bour.

Ceux qui ont vraiment la Foi, qui en usent pour mettre de la beauté dans le monde, pour mettre les gens en communion les uns avec les autres, pour faire le bien autour d’eux et répandre l’Amour, ceux-là jouent avec Atout. Et ça change tout ! Parce qu’alors même les As de notre monde se plient face au plus petit, face au Bour.

Et le Bour, dans notre Foi, c’est le Christ-Roi, bien sûr, chers Amis.

Dans tous les textes d’aujourd’hui on nous parlait de royauté, mais d’une royauté étrange qui n’est pas celle des puissants de ce monde.

« Le Seigneur est roi » disait notre psaume. Oui, il est roi. Mais sa royauté n’a rien à voir avec la royauté du monde.

La première lecture, le livre de Daniel, disait que sa royauté ne passera jamais – c’est déjà très différent de celle des rois et des présidents de notre monde !

Son palais est une étable. Son carrosse est un petit âne. Sa monnaie à lui s’appelle l’amour, l’autre il s’agit de la rendre à César. Ses serviteurs ? Mais c’est lui qui leur lave les pieds. Son banquet est fait d’un peu de pain et de vin. Son sceptre est un rameau d’olivier. Sa couronne est une couronne d’épines. Et son trône… est une croix.

« Ma royauté n’est pas de ce monde » dit Jésus à Pilate, dans l’Evangile que nous venons de réentendre.

Elle renverse toutes les valeurs, cette royauté, elle supplante toutes les autres. « Jésus-Christ est le prince des rois de la terre », disait notre deuxième lecture, l’Apocalypse.

Le prince des rois, le Bour, le simple paysan qui gagne sur tous les autres, bien sûr, c’est lui…

Vous voyez que même sur nos jeux de cartes, on a beaucoup à apprendre de notre foi ! Et je gage que vous ne jouerez plus au Jass, désormais, sans penser au Christ-Roi !

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Aigle, dimanche 20 novembre 2021, 8.30 (version enregistrée)

Aigle, dimanche 20 novembre 2021, 10.00

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…et dans une version assez semblable jadis :

Vex, samedi 24 novembre 2018, 18.30

Les Haudères, dimanche 25 novembre 2018, 10.00




Ce que le Christ ne sait pas…

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Homélie pour le 33e dimanche TO, année B 

Daniel 12,1-3 / Psaume 15  /  Hébreux 10,11-14.18 / Marc 13,24-32

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

 

J’ai une question, là tout de suite, pour vous : y a-t-il quelque chose que le Christ ne sait pas ? …Vous êtes-vous déjà posé cette question ?

…Y a-t-il quelque chose que le Christ ne sait pas ?

Dans sa vie terrestre, parmi nous, la chose méritait déjà réflexion : savait-il qu’il allait souffrir, par exemple ? Oui, il l’a dit à ses disciples : « Il faut que le Fils de l’Homme souffre, qu’il meure… » Il le savait donc.

Mais cela ne l’a pas empêché de demander au Père d’éloigner de lui cette souffrance, au jardin des Oliviers, et même d’accuser le Père de l’avoir abandonné, souvenez-vous, sur la croix : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? »

Le Christ sait-il toute chose ? La réponse est non. Et vous l’aviez très clairement dans l’Evangile que nous venons d’entendre.

Si vous avez bien écouté, le Christ dit lui-même qu’il y a quelque chose qu’il ne connaît pas. C’est le jour où il reviendra. Le jour de l’Apocalypse, le jour de la Révélation. Ce jour-là, le Christ ne le connaît pas.

Je vous relis le texte que vous venez d’entendre, « ce jour-là, dit Jésus, nul ne le connaît, pas même les anges, PAS MÊME LE FILS, seulement le Père. »

… PAS MÊME LE FILS.

Non, le Christ ne connaît pas le jour où il va revenir parmi nous. Et pourtant, cela le concerne directement. Mais il ne connaît pas cette date.

Ceci dit, vous l’avez aussi entendu, il dit : « Cette génération ne passera pas avant que cela n’arrive »…

Et alors là, vous pourriez vous dire : « Non, mais heu… il y a une légère erreur de calcul, Seigneur ! parce que la génération de Jésus et de ses disciples est passée depuis un certain temps, depuis 2000 ans d’ailleurs ! Il y a un petit problème ! »

Et pourtant non, il n’y a pas d’erreur.

Les textes apocalyptiques que nous entendons en ce mois de novembre sont des textes souvent codés. Attention à ne pas les prendre au pied de la lettre !

Même le terme « Apocalypse », vous le savez bien, on le répète assez !

En grec, ça ne veut pas du tout dire « fin du monde », faudrait d’ailleurs le redire à nos journalistes… « Apocalypse », ça veut dire « Révélation ». C’est tout… c’est le jour où l’on comprendra tout. C’est plutôt positif, hein, l’Apocalypse !

Alors certains codes de ces textes nous sont connus. Pas tous, mais certains, oui. Et notamment cette phrase : « cette génération ne passera pas. »

Qu’est-ce que ça veut dire ?

Pour nous, une génération, c’est en gros 25 années, à peu près. Mais pour Dieu, c’est combien, une génération ? Vous le savez, vous ?

Eh bien on le sait à peu près, si on lit les psaumes. Notamment ce psaume 90 qui dit : « A tes yeux, Seigneur, mille ans sont comme un jour, une heure dans la nuit… »

Ah-ha… 1000 de nos années sont comme une heure aux yeux de Dieu. Alors évidemment… faites le calcul… ça fait 600’000 ! Une génération, pour Dieu, c’est 600’000 ans ! J’aime mieux vous dire qu’on a le temps de voir venir, hein ! Les 2’000 ans qui viennent de passer, c’est tout petit par rapport à 600’000 !

« Cette génération ne passera pas », c’est peut-être la génération de la Terre, celle des êtres humains, celle de la lumière, celle de notre soleil. Il y avait d’ailleurs un autre indice dans le texte de ce matin qui plaidait pour cela, puisqu’on nous disait qu’au jour de l’Apocalypse le soleil s’obscurcira…

Peut-être bien que « cette génération », aux yeux de Dieu, c’est celle du soleil dont il s’agit.

Et alors là, j’aime mieux vous dire qu’on a largement le temps puisque les scientifiques prévoient la mort du soleil dans 5 milliards d’années à peu près. Vous ne serez plus là, moi non plus.

A moins, évidemment, qu’on bousille notre planète avant cela. Hélas je crains fort qu’on en ait grandement pris le chemin, mais c’est une autre histoire.

Il y avait d’autres indices dans les textes que nous avons entendus, ce matin.

La lettre aux Hébreux, notre deuxième lecture. Si vous l’avez bien écoutée, on nous disait que le Christ attend quelque chose pour revenir. Il attend quoi ? Le texte nous disait que le Christ attend que ses ennemis soient mis sous ses pieds.

Et là aussi attention à ne pas essayer de comprendre le texte de travers. Les ennemis du Christ, ce ne sont pas forcément ceux qui nous viennent à l’esprit au premier abord : les personnes qui ne croient pas en Dieu, les personnes d’autres religions, celles qui ne sont pas sur ces bancs ce matin… Non !

Quand le Christ parle de ses Amis, il dit que ce sont ceux qui font la volonté de son Père.

Faire la volonté du Père, s’aimer les uns les autres, c’est être un ami du Christ.

Je connais plein de gens qui ne sont pas chrétiens et qui sont des amis du Christ, qui essaient de répandre l’amour autour d’eux.

Je connais des Chrétiens qui ne sont pas spécialement des amis du Christ, d’ailleurs, dans l’autre sens !

Vous voyez que ce n’est pas si simple !

Il attend… il attend que l’amour soit répandu autour de notre monde.

Là encore, j’ai l’impression qu’on a le temps, hélas.

C’est un chemin, au fond. C’est un chemin de sainteté sur lequel nous sommes, Chacune, Chacun, engagés. Le psaume le disait très bien : « Tu m’apprends le chemin de la vie. » C’est donc bien d’un chemin qu’il s’agit, un chemin que nous avons à faire à la suite du Christ.

Alors non, chers Amis, le Christ ne sait pas tout. Mais il y a une chose qu’il sait, c’est qu’il attend. Il attend que nous ayons eu Chacune, Chacun, le temps de répandre l’amour autour de nous. C’est notre mission dans ce monde.

A nous de saisir cette chance de répandre l’Amour de Dieu autour de nous, de le faire connaître autour de nous, chaque fois que nous le pouvons.

C’est ainsi que nous ferons « briller la justice », comme le disait la première lecture, le livre de Daniel.  C’est ainsi que les êtres humains deviendront des justes et « brilleront à leur tour comme les étoiles du ciel », je reprends les mots de la première lecture.

Puissions-nous, nous aussi Chers Amis, un jour, être de ces étoiles, de ces justes qui font la volonté du Père.

Et d’ici-là, cheminons à la suite du Christ qui, comme nous, ne sait pas tout.

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Dans une version pour enfants : Bex, 13 novembre 2021, 18.00

Aigle, 14 novembre 2021, 8.30

Aigle, 14 novembre 2021, 10.00 (version enregistrée)

 




Deux pièces…

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Homélie pour le 32e dimanche TO, année B

1Rois 17,10-16 / Psaume 145 / Hébreux 9,24-28 / Marc 12,38-44

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

Durant toute mon enfance, j’ai vécu dans quelques dizaines de mètres carrés. Mes trois frères, mes parents et moi-même, nous avons toujours vécu dans un trois pièces et demi.

Mais Genevois, le trois pièces et demi, c’est-à-dire le seul canton de Suisse où la cuisine compte comme une pièce. Il en reste donc deux et demi. Deux et demi pour 6 personnes, j’aime mieux vous dire qu’il vaut mieux s’apprécier et bien s’entendre ! Ce qui fut notre cas. Et sûrement que ça aide, d’ailleurs.

Mais même si mon frère aîné est parti assez vite de la maison, nous étions un peu serrés, c’est vrai. Mes parents n’ayant pas de vraie chambre à eux pendant des années où ils dormaient dans le salon, avant de transformer chaque matin leur lit en joli canapé tous les matins pour que la pièce redevienne accueillante aux visiteurs.

Et des visiteurs, il y en avait ! Mes parents m’ont appris le sens de l’accueil et j’ai vu défiler bon nombre d’amis à la maison. Chaque personne qui sonnait avait droit à du temps, à un bon café, à une écoute, à un peu de chaleur humaine.

Et je crois pouvoir dire qu’on a tous vécu très heureux dans ce petit appartement qu’ils occupent d’ailleurs toujours, en ville de Genève.

Plusieurs de mes confrères, eux, ont de grandes cures, de grands presbytères à leur disposition avec parfois des dizaines de pièces pour eux seuls, les cures ayant été faites, au départ, pour abriter plusieurs prêtres… eh oui… et vu le nombre qu’on est aujourd’hui, forcément… aujourd’hui il y a plus de cures que de prêtres et les maisons de paroisses deviennent beaucoup trop grandes.

Pour ma part, comme je suis aumônier d’hôpital je ne vis pas dans une cure. J’ai la chance d’avoir un logis à ma taille : j’ai un petit deux-pièces proche de l’hôpital où je travaille. Une chambre et un salon avec deux fauteuils pour recevoir. Et ça me suffit largement.

Le pape François lui aussi, vous le savez bien, vit dans un simple appartement de deux pièces. Ça change, là aussi. Et ça fait du bien, je trouve, que l’Eglise évolue peu à peu vers un petit plus de simplicité. Et que ses ministres vivent désormais plus conformément à l’annonce de l’Evangile.

Parce que l’Evangile, et notamment la page que nous avons réentendue il y a quelques instants, nous parle de simplicité.

Cette petite veuve qui donne deux piécettes… et pourtant c’est tout ce qu’elle a… Elle donne de son nécessaire pour Dieu et pour les autres.

Jésus la montre en exemple à son entourage. Et l’entourage de Jésus connaît parfaitement l’autre texte que nous avons entendu en première lecture. L’épisode du livre des Rois, avec cette autre veuve qui donne tout ce qu’elle a pour accueillir un visiteur, le prophète Elie, un homme de Dieu.

Je connais de nombreuses personnes, et il y en a parmi vous, qui ont cette générosité-là, ce sens de l’accueil, qui n’ont peut-être pas grand-chose pour vivre, mais qui en donnent encore pour les autres, y compris s’ils doivent prendre de leur nécessaire.

Ça, c’est une attitude tirée de l’Evangile je crois.

Pour vous reparler un instant de ma famille, nous avions très peu d’argent chez moi. Papa était ouvrier et Maman mère au foyer.

Et je les ai vus, mes parents, mettre de l’argent dans des enveloppes chaque mois. Une enveloppe marquée « vacances »… Une enveloppe marquée « repas »… Une enveloppe marquée « pour les cadeaux des enfants »…

Et je les ai vus chaque semaine empiler soigneusement – il le font toujours d’ailleurs, même à 86 ans – je les ai vus chaque semaine empiler soigneusement des pièces de cinq francs. La plus grosse des pièces… pour la quête, à la messe, le dimanche. Et chaque dimanche, je les voyais partir à la messe avec deux pièces, une chacun, pour les mettre à la quête.

Et pourtant dans certaines de ces enveloppes on comptait les centimes… pas les francs ! Une pièce de cinq francs, c’était précieux. Très précieux. Mais mes parents ont toujours pris de leur nécessaire pour Dieu. Et donc pour les autres puisque, vous le savez, l’argent de la quête est distribué aux personnes qui en ont besoin.

Le trésor de notre foi, je crois, chers Amis, ne se trouve pas dans les vêtements d’apparat… dans les vêtements de ceux qui aiment les salutations, les places publiques, comme le disait Jésus.

Le trésor de notre foi n’est pas non plus dans un temple si beau soit-il. Notre deuxième lecture nous rappelait cela, la lettre aux Hébreux. Le trésor de la foi n’est pas dans du matériel.

On s’est trompé longtemps dans l’Eglise avec l’idée que rien n’était trop beau pour Dieu. On avait des calices en or massif, des vêtements de cérémonie qui valaient des fortunes.

Mais ça n’est pas l’Evangile, ça !

Quand on dit : « rien n’est trop beau pour Dieu », on parle de gestes ! De beaux gestes, de belles attitudes, d’amour, de charité. Dans ce domaine-là, rien n’est trop beau pour Dieu, effectivement. Mais on ne parle pas de compte en banque.

Le temple de Dieu est là-haut, dans les cieux, comme la Jérusalem céleste qui nous attend – nous l’avons chanté au début de cette célébration. Et nous n’y emporterons que l’amour que nous aurons répandu autour de nous.

Les linceuls n’ont pas de poches, comme le dit volontiers le pape François. Nous n’emporterons que ce que nous aurons donné autour de nous.

C’est ça, être chrétien, je crois.

Peu importe ce que l’on a. Mais partageons-le. Soyons toujours prêts à cela, au nom de Jésus.

Amen.

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Champex, 6 novembre 2021, 17.00

Carmel du Pâquier, 7 novembre 2021, 9.00




Essayons d’être UN et parlons hébreu

Photo DR : jw.org – le nom de Dieu écrit en hébreu

 

Homélie pour le 31e dimanche TO, année B

 

Deutéronome 6,2-6 / Psaume 118  /  Hébreux 7,23-28 / Marc 12,28b-34

 

NB : en 2021, l’abbé Vincent n’a pas prêché en paroisse ce week-end. Voici une homélie tirée des mêmes textes il y a trois ans.

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

 

Je commence par une petite anecdote. Elle est arrivée à l’un de mes confrères il y a quelques années dans une abbaye en France. Il arrive et accueilli par le père abbé, il lui demande :

–       Combien êtes-vous encore, dans cette abbaye ?

Le père abbé a eu une réponse sublime, il lui a dit :

–       Mon frère, nous essayons d’être UN.

 

En cela, ce père abbé avait parfaitement compris et intégré les textes de ce matin. Parce que c’est cela, le fil rouge : essayer d’être UN.

 

Commençons par le deuxième, la lettre aux Hébreux, qui nous expliquait qu’avant il y avait une multitude de grands-prêtres et qu’aujourd’hui il n’y en a plus qu’un, le Christ, le seul Grand-Prêtre. Et tous vos prêtres, les évêques, le pape, nous faisons UN avec lui quand nous célébrons. A chaque fois que nous portons notre étole nous essayons de faire UN avec le Christ.

 

Et il y avait ce premier texte, le texte du Deutéronome. Vous ne le savez peut-être pas mais c’est un texte sacré, l’un des plus sacrés pour les Juifs, cet extrait que nous avons entendu ce matin. Ils redisent une partie de ce texte tous les matins et tous les soirs.

 

Et donc Jésus répétait ce texte tous les matins et tous les soirs, on a un peu tendance à oublier qu’il était juif…

 

Ce passage du Deutéronome que répètent les Juifs, que nous les religieux nous répétons aussi d’ailleurs chaque samedi soir à l’office des Complies, ce passage dit : « Ecoute Israël, le Seigneur ton Dieu est UN. »

 

Bon, là je vous l’ai dit en français, mais dans la langue de Jésus c’est tellement beau :

Shma Yisraël, Adonaï Eloïnou, Adonaï Echad !

 

C’est beau, l’hébreu ! C’était la langue de Jésus.

 

Certaines de nos Bibles traduisent par « unique » – c’est ce que vous avez entendu : « le Seigneur est l’Unique » – d’autres traduisent par : « Le Seigneur est UN ».

 

Et en fait on peut faire les deux, parce que le mot hébreu est intraduisible. Il veut dire à la fois « unique » et à la fois « un ».

 

Notre Seigneur est à la fois le seul, l’unique, et à la fois il est UN, unifié en lui-même. Il est le TOUT, même s’il a trois visages.

 

Et puis le Deutéronome ajoute : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton coeur, de toute ton âme et de toute ta force. »

 

Et alors là, je vais vous emmener faire un tout petit peu d’hébreu. Parce que, pour bien comprendre cette phrase, il faut connaître le sens de trois mots.

 

Le CŒUR, pour les Hébreux, c’est le lieu de l’intelligence, c’est le lieu où l’on réfléchit.

 

Pour nous, ce serait [montrant le front] là, le cœur. C’est bizarre, hein ? Mais c’est comme ça. Quand un Hébreu parle du cœur, il parle du lieu où l’on réfléchit, où l’on pense.

 

L’ÂME, pour un Hébreu, c’est le souffle de vie, ce qui sort de notre bouche et de nos narines. Ce serait plutôt [montrant nez et bouche] ici, l’âme.

 

Et la FORCE, pour un Hébreu, c’est tout ce que nous avons [montrant le coeur] là. C’est… nos passions, l’Amour, le courage, la volonté, tout ce que nous avons dans le cœur.

 

[refaisant les trois gestes] Tu aimeras le Seigneur de tout ton coeur… de toute ton âme… de toute ta force.

 

 

Ça ne vous rappelle rien…?

 

Vous venez de faire ces trois gestes. Nous les faisons au début de chaque Evangile.

 

Nous nous faisons une croix sur le front, une sur la bouche, une sur le cœur, sans savoir que cela vient précisément de ce texte-là.

 

Nous, nous disons « Gloire à toi Seigneur », et c’est très bien parce que cela veut dire que nous reconnaissons que la Parole que nous allons entendre vient de notre Seigneur, et nous lui rendons gloire.

 

Mais nous pouvons aussi dire, comme certains le font :

 

Que ta parole soit…

[refaisant les gestes] :

dans mon ESPRIT pour que je la comprenne bien

sur ma BOUCHE pour que je puisse la redire autour de moi

et dans mon CŒUR pour que je la conserve à tout jamais

 

C’est le sens premier de ces trois gestes, vous y penserez, désormais…

 

Tout cela, c’est dans le Deutéronome, chapitre 6, versets 4 et 5, texte sacré pour les Juifs.

 

Et si vous avez bien écouté l’Evangile, quand le scribe demande à Jésus de lui redire quel est le plus important de tous les commandements – il s’attend à entendre cela, évidemment ! – Jésus le redit mais il ajoute quelque chose.

 

Ah, évidemment, il fallait être attentif…

 

Jésus lui dit « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, DE TOUT TON ESPRIT et de toute ta force… »

 

Et quand la Bible reprend un texte en ajoutant quelque chose, ça n’est jamais innocent. A fortiori, si c’est Jésus qui le fait.

 

Il sait qu’il est venu nous donner l’Esprit. Et que nous avons cela, en plus désormais, en nous. Pour comprendre sa Parole, pour l’intégrer, pour en vivre, pour nous aider dans nos vies respectives.

 

C’est aussi grâce à cet Esprit Saint que nous pouvons aimer désormais notre Dieu. D’où notre devoir de prendre cet Esprit – que nous avons reçu au baptême – au sérieux : il habite en nous.

 

Et puis Jésus ajoute aussi autre chose… et vous l’avez ré-entendu : « tu aimeras ton prochain comme toi-même. »

 

Aimer son prochain, on voit assez ce que cela signifie. Les bulletins de versement que nous recevons presque tous les jours nous le rappellent. Et c’est important d’aimer son prochain.

 

Mais Jésus n’arrête pas là sa phrase, et on aurait tendance à oublier la deuxième partie « aime ton prochain COMME TOI-MÊME ! »

 

Ce qui veut dire : « Prends soin de TOI aussi, fais attention à ton attitude, à tes pensées, à ton apparence. Aime le calme, le silence, les belles choses, les bons sentiments. Parce qu’alors c’est comme ça que tu vas aimer ton prochain, aussi. »

 

Au contraire, si tu te dénigres toi-même, si tu passes tes journées à te dire « ah mais je suis trop bête, mais je suis trop nul, mais quel imbécile… » eh bien c’est comme ça que tu risques d’aimer ton prochain, aussi…

 

Aime ton prochain comme toi-même…

 

On devrait y penser plus souvent. Il ne s’agit pas de se poser devant la glace et de dire « Je suis le meilleur » ou « Je suis la plus belle… » …même si c’est vrai, Mesdames !

 

Il ne s’agit pas de faire ça. C’est pas ça, s’aimer soi-même, au sens où Jésus le dit. C’est avoir de l’indulgence envers soi-même. Etre bienveillant envers soi-même. Etre tolérant envers soi-même, alors nous serons de même pour les autres.

 

Voilà chers Amis. Pour résumer tout cela, je vais demander à Lorine et à Elsa de vous distribuer maintenant une petite feuille, parce que je vous connais – et je suis comme vous – dès la sortie de la messe vous allez oublier ce que c’est qui était là, là, là… « il y avait le cœur, il y avait l’intelligence, dans quel ordre ça allait ? Je ne sais plus… »

 

Grâce à cette feuille vous allez pouvoir vous en souvenir et vous allez même pouvoir relire la phrase en hébreu… Je l’ai écrite en hébreu – mais ça je pense qu’il y a peu de gens parmi vous qui savent le lire d’autant que ça se lit dans l’autre sens, de droite à gauche, et puis c’est des caractères bizarres – mais j’ai mis en-dessous comment ça se prononce, comme je l’ai fait tout à l’heure. Et on va le refaire ensemble, vous allez voir, c’est pas difficile. Essayez…

 

Ecoute Israël… c’est : SHMa YiSRaëL…

–      SHMa YiSRaëL…

Le Seigneur ton Dieu… c’est : aDoNaï éloHéiNou…

–      aDoNaï éloHéiNou…

Et le Seigneur est UN… c’est : aDoNaï eCHaD…

–      aDoNaï eCHaD…

 

Et ben vous voyez, vous parlez hébreu, c’est magnifique !

 

Alors si l’on vous demande par hasard, comme à nous l’autre jour avec mes parents, quand il y a une naissance dans votre famille : « Alors, vous êtes combien maintenant ? », eh bien vous pouvez aussi répondre : « Vous savez, nous essayons d’être UN. ».

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Hérémence, dimanche 4 novembre 2018, 9.00

Evolène, dimanche 4 novembre 2018, 10.30 (version enregistrée)

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Feuillet distribué :




L’aveugle et le parking

Photo libre de droits : piqsels

 

Homélie pour le 30e dimanche TO, année B

Jérémie 31,7-9 / Psaume 125  /  Hébreux 5,1-6 / Marc 10,46b-52

 

NB : l’abbé Vincent n’a pas prêché publiquement ce week-end en 2021. Voici une homélie sur les mêmes textes prononcée il y a trois ans. 
> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

 

La scène que je vais vous raconter est authentique. Elle se passe dans le parking souterrain d’un très grand centre commercial, à Genève, un samedi après-midi, il y a quelques années de cela.  J’étais au volant de ma voiture et j’y cherchais désespérément une place de parking.

 

Vous savez comment c’est : le samedi après-midi, tout le monde est dans les magasins, on est un tout petit peu nerveux, tous, hein, on a tous des trucs à faire, et on cherche… on cherche des places. Le parking est plein, tout le monde s’énerve, surtout en ville !

 

Tout à coup je vois la place libre. La seule ! Alors j’amorce mon virage pour entrer dans la place et là je vois une voiture qui était 20 mètres devant moi freiner et se mettre à reculer à toute vitesse.

 

Je me dis : « Mais il est fou ! Il va me rentrer dedans ! » Non, il s’arrête, il plante les freins, il sort de sa voiture, furax, et il me dit : [accent genevois] « Vous êtes aveugle, ou bien ? » (il aurait pu ajouter « debleu-debleu ! »)

 

Devant mon air ahuri, comme je ne répondais rien, il me dit : « Vous êtes aveugle ou bien ? Vous avez pas vu que c’était MA place ?? »

 

J’étais tellement surpris que j’ai éclaté de rire. Je lui ai dit : « Attendez Monsieur, j’arrive à la hauteur de cette place, je m’y engage, et vous vous faites 20 mètres en marche arrière au même moment et vous me dites que c’est VOTRE place ? Vous n’êtes pas sérieux ? Et puis, en plus, vous me dites que je suis aveugle ? »

 

J’étais quand même un peu étonné parce que moi, j’avais VU la place… Tandis que lui, il était passé devant sans la voir et puis il revenait en arrière… Qui était l’aveugle de nous deux ??

 

C’est plutôt sa colère qui l’aveuglait. Comme ça nous arrive – ça peut nous arriver – à tous. Il était furieux, d’abord contre lui-même, de n’avoir pas vu cette place, il était furieux contre son propre aveuglement…

 

Et en relisant l’Evangile sur l’aveugle qui rencontre Jésus, je repense toujours à cette histoire de parking… Parce qu’il y a là, dans le texte, un aveugle, un vrai. Et dans le contexte de l’époque il est mis de côté par les autres, marginalisé, diabolisé même.

 

Ça nous paraît étrange aujourd’hui, mais à l’époque on croyait que si quelqu’un était aveugle, c’était de la faute de ses erreurs, de ses péchés. Donc, on l’évitait, on le mettait de côté. C’est terriblement injuste évidemment, mais c’est ainsi qu’on voyait les choses – enfin quand je dis « qu’on VOYAIT »… on s’entend ! – c’est ainsi qu’on pensait à l’époque.

 

Il est donc rejeté au bord du chemin, cet aveugle. Et ce n’est pas d’abord sa cécité qui le place en marge. C’est d’abord l’aveuglement des autres ! Ce sont eux qui sont aveuglés par des croyances obscurantistes et c’est à cause de cet aveuglement qu’il est laissé pour compte, sur le bord du chemin. Donc l’aveugle, dès le début de cette histoire, n’est pas forcément celui que l’on croit.

 

Mais ça continue, vous l’avez entendu… Alors que les gens suivent Jésus sans trop savoir qui il est, un peu aveuglément, l’aveugle, lui, crie son nom et sa filiation : « Jésus, Fils de David ! »

 

Alors que les disciples n’ont pas encore vraiment compris qui est Jésus, l’aveugle, lui, le sait.

 

Il voit clair, sur ce coup-là.

 

Et juste après, Jésus demande qu’on lui amène l’aveugle, mais l’aveugle n’a pas besoin qu’on l’amène, vous l’avez entendu ! Il jette son manteau, il bondit, et il court vers Jésus. Vous avez déjà vu un aveugle courir, vous ? Un signe de plus que l’aveugle n’est pas celui qu’on croit… Il est réellement aveugle, mais il est tellement confiant qu’il est déjà capable de courir en avant.

 

Il JETTE son manteau. Ça aussi, c’est un geste très intéressant, au passage. Parce que… il est probablement tout nu, en-dessous ! C’est comme ça, à l’époque, on a une tunique… et en-dessous, il n’y a rien. Et donc s’il jette son vêtement, il n’a pas peur du regard des autres, encore moins du regard de Jésus… Encore une fois l’aveugle n’est pas celui que l’on croit, dans cette histoire…

 

Et puis il demande à Jésus : « Fais que je voie ! » Il sait, de toute sa Foi, que Jésus peut le guérir. Et en ce sens il est sacrément clairvoyant, notre aveugle.

 

Combien de fois, nous – enfin je ne sais pas vous, mais… – il me semble que ça nous arrive dans notre prière de demander sans trop oser demander… En disant « Bon Seigneur, je te demande ça, mais… en même temps j’ose pas trop demander pour moi, je devrais plutôt d’abord demander pour d’autres… » On a souvent peur de demander l’impossible dans notre prière, on se dit : « On ne va pas le déranger avec ça… et puis de toutes façons c’est impossible, alors à quoi bon ? »

 

L’aveugle, lui, demande l’impossible – « Fais que je voie ! » – et il y croit.

 

Et que se passe-t-il alors ? Eh bien là c’est toujours pareil avec les histoires de miracles, dans les Evangiles : on aimerait bien avoir le film, et on l’a pas. On aimerait bien savoir si Jésus a touché la personne, s’il a utilisé un objet, une baguette magique, une formule, est-ce qu’il a dit quelque chose ?… On n’en sait rien.

 

Et comme pour nous montrer que ce n’est pas çà l’important, que l’essentiel est invisible pour les yeux, comme disait le Petit Prince, la Bible ne nous dit rien.

 

Mais elle nous dit la phrase qui suit le miracle. Que dit Jésus après ? Il dit : « Va, ta foi t’a sauvé ! » Ce n’est pas lui, Jésus, qui a rendu la vue à l’aveugle, c’est la foi de l’aveugle qui l’a sauvé.

 

C’est la FOI qui rend la vue, ce n’est pas un geste magique à la Harry Potter ou un gadget à la James Bond. C’est la foi de l’aveugle, la foi de celui qui demande qui sauve.

 

On devrait y penser plus souvent quand on hésite à demander quelque chose de fort dans notre prière. Il faut oser ! Et il faut oser demander avec foi ! C’est la foi qui fait des miracles.

 

Et si l’aveugle ose demander, c’est justement parce qu’il n’est pas aveuglé par la peur, par le doute, par la colère, par les préjugés…

 

L’aveugle de notre histoire, chers Amis, c’est peut-être le plus clairvoyant de tous, ce jour-là, au bord du chemin. Et c’est alors qu’il se met à suivre Jésus.

 

…« Vous êtes aveugle, ou bien ? » me demandait ce conducteur genevois, dans ce parking. Mais c’est sa colère qui l’aveuglait lui. C’était lui l’aveugle. Et moi j’ai ri à ce moment-là.

 

Vous avez probablement envie de savoir ce qui s’est passé ensuite… ? Eh bien figurez-vous qu’il s’est mis à rire lui aussi ! « Excusez-moi, m’a-t-il dit… Je suis ridicule. Vous étiez là avant moi. »

 

Et comme ça faisait déjà une bonne minute qu’on était tous les deux dehors de nos voitures, en bouchant le passage, il y a eu des coups de klaxons derrière nous : les autres automobilistes qui s’énervaient. Dont un, juste derrière, qui a baissé sa vitre et qui nous a dit : « Mais vous ne voyez pas qu’il y a une deuxième place, juste là-devant ! » Et devant notre air ahuri, il ajoute : « Vous êtes aveugles, ou bien ? »

 

On a ri, parce qu’on était tous les deux aveugles, ce jour-là. Et on est même allé boire un café ensemble, cet après-midi, alors qu’on ne se connaissait pas dix minutes avant.

 

…Chers Amis, combien de fois la colère nous aveugle-t-elle, dans notre vie ? Moi le premier, je suis plus souvent dans le cas du chauffeur qui s’énerve que dans le cas de celui qui rit, je vous assure ! Mais la foi, l’humour sauvent beaucoup de situations.

 

Il fallait de la foi et de l’humour à l’aveugle pour bondir, pour courir vers Jésus, tout nu. Il nous en faut tous les jours, de la foi et de l’humour, et pas seulement au volant de nos voitures, Dieu le sait bien.

 

Et la lettre aux Hébreux nous rappelait que le Grand-Prêtre a été l’un de nous, avec nos faiblesses, avec notre foi, avec notre humour aussi. Il est venu vers nos faiblesses, pour nous relever. Pour ramener les captifs que nous sommes, comme disait le psaume. Il sait bien qu’il y a parmi nous l’aveugle, le boiteux, comme le disait la première lecture. Qu’on a des défauts, tous.

 

Et c’est parce qu’il le sait, parce qu’il nous sait faibles, aveugles parfois, plus souvent qu’à notre tour, c’est parce qu’il le sait qu‘il est venu nous rendre la vue et nous permettre de prendre le chemin à sa suite.

 

En y repensant, je me disais que… c’est une sacrée bonne nouvelle au fond !

 

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Les Haudères, samedi 27 octobre 2018, 20.00 (version enregistrée)

Evolène, dimanche 28 octobre 2018, 10.30

Euseigne, dimanche 28 octobre 2018, 18.00

 

…et dans une version relativement proche, jadis :

Les Haudères, samedi 24 octobre 2015, 20.00

Evolène, dimanche 25 octobre 2015, 10.30

Euseigne, dimanche 25 octobre 2015, 18.00




Dieu souffre avec nous

Photo libre de droits : pixabay

 

Homélie pour le 29e dimanche TO, année B

Isaïe 53,10-11 / Psaume 32  /  Hébreux 4,14-16 / Marc 10,35-45

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

Chers Amis,

Qui attendons-nous lorsqu’on nous dit « Dieu reviendra… » ? Vous me direz « on attend Dieu ! » Bien sûr… le retour du Messie !

Mais il me semble que, vous et moi, nous sommes souvent un peu les mêmes concernant cette question-là.

Nous attendons un Messie, oui mais… nous attendons un Messie qui règle tous nos problèmes.

D’ailleurs c’est ce que le psaume disait : « Nous attendons notre VIE du Seigneur ! » C’est pas rien, n’est-ce pas !

On attend Dieu… alors bien sûr pas le genre Superman avec une cape bleue et rouge, non bien sûr… mais quand même on attend quelqu’un qui règle tous les problèmes de notre existence.

Un Sauveur qui va balayer le CoVid, enlever tous les passes sanitaires nécessaires, régler d’un seul coup la question des primes d’assurances maladies…

Un Sauveur qui nous montre à la fois le bon candidat à la présidentielle française et qui règle la paix dans le monde entier !

Un Sauveur qui apporte la solution à tous les problèmes de pédophilie, dans l’Eglise et ailleurs…

On attend quelqu’un qui règle tous les problèmes.

Mais c’est pas Dieu, ça… C’est pas Dieu, ça…

Dieu n’est pas Harry Potter, Dieu n’est pas James Bond, Dieu n’est pas Superman.

Nous avons un Dieu très particulier, quand on y pense, nous autres les Chrétiens. Un Dieu qui fait scandale dans les autres religions mais on s’y est tellement habitués que pour nous, ça paraît presque normal quand nous entendons cette première lecture du prophète Isaïe nous dire que le Messie doit souffrir… qu’il doit être bafoué par la foule, qu’il doit même mourir comme un esclave.

On sait bien que c’est de Jésus dont parle le prophète Isaïe… nous, on le sait ! Mais Isaïe a écrit cela plusieurs siècles avant l’arrivée de Jésus. Et pour les contemporains d’Isaïe ce texte est un véritable scandale : le Messie ne peut pas souffrir, Dieu ne peut pas mourir, ce n’est pas possible !

Et d’ailleurs si vous discutez avec des gens d’autres religions que la religion chrétienne ils vous le diront : « Dieu ne peut pas mourir, il ne peut même pas souffrir, c’est impensable ! »

Et pourtant, dans notre religion chrétienne, ce qui est beau précisément c’est que nous avons un Dieu qui s’est fait l’un de nous. Un Dieu qui s’est fait humain, qui a souffert comme nous souffrons – et même plus que la plupart d’entre nous allons souffrir parce que nous n’allons pas mourir crucifiés, nous, à priori… et il est mort. Il a passé par cette grande épreuve par laquelle nous allons tous passer. C’est même l’un de nos rares points communs à toutes et tous : nous allons tous mourir un jour ou l’autre. Et Dieu a choisi de passer lui aussi par cette épreuve pour ne pas être différent de nous.

Notre Dieu n’est pas un Dieu distant qui nous soumettrait à telle ou telle règle de vie, il n’est pas non plus une ribambelle de petits dieux auxquels il faudrait sacrifier tel ou tel objet, ou tel ou tel culte, il n’est pas un Dieu qui nous promettrait d’échapper à toute souffrance en nous enlevant de cette vie et en commençant par faire le vide absolu en nous et autour de nous, non.

Il n’est ni le dieu de l’Islam, ni les dieux de l’hindouisme, ni Bouddha.

Notre Dieu est présence. Présence dans nos vies et jusqu’au fond de nous-mêmes par l’Eucharistie ! C’est tellement immense qu’on n’y fait même plus attention. Quand vous ressortirez de cette église tout à l’heure après avoir consommé l’Eucharistie, Dieu sera à l’intérieur de vous !

Dites ça à un Musulman, à un Bouddhiste, à un Hindouiste, il vous dira « c’est pas possible ! »…

Eh si… Dieu s’est fait l’un de nous jusqu’au plus intime de nous-mêmes, jusqu’à venir à l’intérieur de nous.

Si vous faites du Yoga, s’il y en a parmi vous qui font cette gymnastique, si vous le faites pour la gymnastique grand bien vous fasse, hein ! Mais si essayez d’y trouver une spiritualité vous vous fourrez le doigt dans l’œil jusqu’au coude hein ! C‘est l’exact contraire du Christianisme : il s’agit dans la spiritualité du Yoga de se vider entièrement… pas pour faire une place à Dieu, hein, pour se vider. C’est le contraire du Christianisme.

Nous, nous avons Dieu à l’intérieur de nous. Il s’agit de pas de se vider ! Alors il faut lui faire une place, je suis d’accord… mais nous avons QUELQU’UN à l’intérieur de nous, c’est tout autre chose !

Et il s’agit de comprendre que Dieu est venu non seulement épouser notre condition humaine mais qu’il est venu partager tout ce que nous vivons, nos souffrances et jusqu’à l’épreuve ultime par laquelle nous passerons tous, la mort.

Seulement nous, nous attendons encore trop souvent un magicien, un Dieu de gloire au sens où le monde entend ce mot gloire. Un Dieu qui fasse la première page des magazines.

Et la question de Jacques et de Jean, dans l’Evangile, elle est pétrie de cela. Eux aussi ils attendent un grand Dieu Sauveur. Et ils lui demandent s’ils pourront être à sa droite et à sa gauche… premier ministre et ministre de l’intérieur… et ils ont rien compris.

…C’est pas ça, Dieu.

Avec Dieu il ne s’agit pas de savoir si on est à sa droite ou à sa gauche il s’agit de comprendre que c’est lui qui vient à notre droite et à notre gauche, dans les épreuves que nous traversons, Ça n’a rien à voir !

Mais eux, ils attendent un Messie de gloire.

Et Jésus leur pose la question qui tue, vous l’avez entendue – la question qui tue au propre comme au figuré d’ailleurs : « la coupe à laquelle je vais boire » – sous-entendu le sang du sacrifice, c’est ça, la coupe, hein ! – « la coupe à laquelle je vais boire, est-ce que vous êtes capables d’y boire vous aussi ? »

« Le baptême dans lequel je vais être plongé » – sous-entendu la mort – « est-ce que vous êtes capables de m’y suivre ? »

Et eux qui n’ont rien compris disent : « Bah bien sûr qu’on peut ! »

Eux, ils ont entendu coupe de gloire, de célébrité, baptême de pouvoir… et ils n’ont rien compris.

Et on connaît la suite…

Mais NOUS, aujourd’hui ? Est-ce qu’on a cheminé, un peu ? Est-ce qu’on a un peu mieux compris ?

Pas sûr… nous attendons encore trop souvent, je crois, un Sauveur à la manière Hollywoodienne.

Alors il nous faut méditer cette deuxième lecture que nous avons entendue. Parce que la clé s’y trouve. La lettre aux Hébreux – dont nous ignorons tout de l’auteur, d’ailleurs – sinon qu’il écrit pour des Chrétiens, comme nous.

Que nous disait ce texte ?

D’abord il confirmait ce que disait le prophète Isaïe : Jésus est bien le Messie, le Grand-Prêtre. C’est lui. Il ne fallait pas en attendre un autre.

Et puis il confirmait qu’il faut attendre son retour. « Tenez ferme »… ça continue, l’histoire n’est pas finie !

Enfin, ce texte nous faisait comprendre le sens de ce que je vous dis depuis quelques minutes : « Le Grand-Prêtre que nous avons, dit la lettre aux Hébreux, n’est pas incapable de partager nos faiblesses : en toutes choses il a connu l’épreuve, comme nous. »

C’est SPLENDIDE et nous mesurons trop rarement la portée de ce texte : NON, notre Dieu n’est pas un personnage distant qui nous regarderait de là-haut, petites fourmis sur notre petite planète, avec une attitude vaguement sadique : « Je vais leur envoyer un tremblement de terre, un tsunami, tiens un CoVid, pour rire… ».

C’est pas Dieu, ça… non…

Dieu est l’un de nous.

Il souffre du CoVid avec tous ceux qui en souffrent.

A chaque fois que l’un de nous, y compris et notamment les plus petits, à chaque fois que l’un de nous est bafoué, c’est Jésus qui est bafoué.

A chaque fois que l’un de nous est abusé, c’est Jésus qu’on crucifie à nouveau.

A chaque fois qu’un crime est commis c’est Jésus qu’on tue… et qui va ressusciter puisque rien ne s’arrête à la croix.

Il est venu partager nos souffrances et nous en faire ressusciter avec lui.

AUCUNE autre religion n’a cette richesse, chers Amis.

Sans faire de prosélytisme, il s’agit d’en être heureux, au moins. D’être heureux de ce Dieu qui est l’un de nous, qui « n’est pas incapable de partager nos faiblesses. »

Ainsi nous savons qu’il n’est pas nécessaire d’attendre un grand sauveur apocalyptique.

Il nous faut simplement comprendre qu’il est là, avec nous, au cœur de ce que nous traversons.

Qu’il est là pour vivre chaque aspect de notre vie avec nous, pour cheminer avec nous.

Et ça, c’est une sacrée bonne nouvelle !

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Bex, samedi 16 octobre 2021, 18.00

Aigle, dimanche 17 octobre 2021, 8.30

Aigle, dimanche 17 octobre 2021, 10.00 (version enregistrée)




Mieux comprendre certains textes…

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Homélie pour le 27e dimanche TO, année B

Genèse 2,18-24 / Psaume 127  /  Hébreux 2,9-11 / Marc 10,2-16

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Il y a des dimanches, comme ça, où les sages de Vatican II qui ont découpé les différents textes de nos lectures, ces sages il semblerait qu’ils aient mis tous les textes qu’on comprend mal le même dimanche.

C’est le cas ce matin.

Pourtant… ils sont connus, ces textes. On est même certains de les avoir bien compris… Mais on les a compris tout de travers, la plupart du temps !

Je commence par la deuxième lecture, si vous voulez bien, la lettre aux Hébreux. On nous dit que Jésus a souffert et qu’il est mort.

Vous me direz : « Ça on le sait, hein ! On ne va pas tomber de notre banc de surprise ! » Mais allez dire ça à un croyant de n’importe quelle religion du monde, il va vous dire : « Ce n’est pas possible ! Dieu ne peut pas souffrir, Dieu ne peut pas mourir ! C’est impossible ! »

Un Musulman vous le dira, un Juif vous le dira, un Hindouiste vous le dira, un Bouddhiste vous le dira aussi. « C’est pas possible ! »

C’est ce qui fait la beauté du Christianisme : Dieu s’est fait l’un de nous. L’un de nous !

Alors ça aurait été évidemment trop facile de ne pas se faire l’un de nous jusque-là… On aurait pu lui dire : « Oui mais toi tu es Dieu alors qu’est-ce que tu sais de nos souffrances, finalement, hein ?? »

Eh bien non, Jésus, précisément, il est allé jusqu’à souffrir et même jusqu’à mourir, exactement comme nous !

La souffrance fait partie de la vie… une vie sans souffrance, ça n’existe pas, hein ! On aimerait bien… mais ça n’existe pas.

Il s’est fait l’un de nous jusqu’à épouser ce que nous vivons.

C’est pas pour ça que c’est bien de souffrir, et c’est souvent là qu’on a mal compris ce texte ! C‘est pas parce que Jésus a souffert qu’il faut l’imiter, pas du tout ! C’est lui qui s’est fait l’un de nous, c’est lui qui a souffert parce que nous, nous souffrons. Ce n’est pas pour ça qu’il nous faut nous infliger des souffrances pour l’imiter lui, ce serait un cercle vicieux !

Mais simplement la souffrance fait partie de la vie et il est venu l’habiter, cette vie, comme nous. Il est venu se faire l’un de nous, un être humain.

Cet être humain dont la première lecture relatait la création.

Et là, quand on entend « il n’est pas bon que l’être humain soit seul, je vais lui faire une aide qui lui correspondra », on voit tout de suite, on connaît très bien ce texte…

Première opération chirurgicale de l’histoire, Dieu ouvre, il sort un côte, il vous crée, Mesdames, à partir de cette côte… c’est tout faux.

Vous me direz : « Mais c’est le texte ! »

Oui, c’est le texte, c’est vrai. Mais pour bien le comprendre, il faut connaître une ou deux pettes notions d’hébreu.

Vous me direz : « Oui mais nous, on n’a pas fait d’hébreu ! » C’est pour ça que je suis là.

C’était la langue de Jésus, l’hébreu…

Alors d’abord, Messieurs, quand le texte dit « il n’est pas bon que l’homme soit seul, je vais lui faire une aide qui lui corresponde », cessez de voir la personne qui va repasser les chemises et s’occuper du ménage !

Ça n’est pas ça, le mot aide, dans ce texte.

Le mot « aide », ici, « ézèr » en hébreu, ça veut dire un « secours VITAL », c’est-à-dire quelqu’un sans qui la vie est impossible.

Oui mesdames, c’est ça que cela veut dire : « Il n’est pas bon que l’homme soit seul, je vais lui faire un secours vital sans lequel il ne pourra pas vivre. »

Eh oui… c’est pas rien, hein ! On est assez loin de la personne qui s’occupe des chaussettes sales ! Très loin même !

Et effectivement, Mesdames, sans vous la vie n’est pas possible ! C’est vous qui portez la vie !

Et ça, ça va être encore plus clair juste après dans le texte… avec la fameuse côte.

Ce n’est pas une côte, hein ! Quand on regarde le texte hébreu, Dieu a pris quelque chose de précieux du côté de l’être humain – quelque chose que, Messieurs, nous n’avons donc plus, hein, au passage !

Il a pris quelque chose du côté de l’être humain et il vous a fabriquées, Mesdames, à partir de cela.

Quand on regarde le texte hébreu, c’est le même mot – cette chose qu’il a prise – c’est le même mot que les deux colonnes qui soutiennent le Temple de Dieu !

Alors j’aime mieux vous dire que c’est autre chose qu’une côte, hein ! [montrant les deux colonnes de l’église d’Aigle] C’est du solide, ça ! Ma côte est nettement moins solide que ça !

C’est le même mot pour dire les colonnes qui soutiennent le Temple de Dieu…

Mesdames, c’est à partir de ça que Dieu a créé l’être qui devait porter la vie… qui devait devenir le Temple de Dieu.

Ah oui, évidemment, c’est autre chose, hein !

Les plaisanteries misogynes du style : « Ah bah, vous avez été créées d’une simple côte… » vous pourrez y répondre, Mesdames, la prochaine fois ! Vous amenez la personne jusqu’ici, vous lui montrez ça [les colonnes de l’église] et vous lui dites : « C’est ça, mon gars, hein, c’est pas une simple côte ! »

Ah évidemment, quand on lit les textes en les comprenant un peu mieux, ça change tout…

Reste alors l’Evangile qui nous avait été proposé aujourd’hui.

Parce que Jésus non seulement s’est fait l’un de nous, en épousant notre souffrance, notre mort, en devenant l’un de ces êtres que Dieu avait créés dans la Genèse, mais il s’est fait l’un de nous avec toutes nos règles les plus compliquées. Il a aussi souffert de cela.

Et quand pour le piéger, on lui demande s’il est permis de renvoyer sa femme – vous l’avez entendu dans le texte – il commence par dire au docteur de la Loi : « Alors déjà, mon gars, ça va dans les deux sens, hein ! C’est pas que l’homme qui peut renvoyer sa femme, le contraire est possible aussi ! » vous l’avez entendu…

Mais comme s’il voulait nous dire : « Mais c’est pas ça, vos relations, elles ne se basent pas sur le fait de renvoyer l’autre ! », eh bien une fois qu’il est seul avec ses disciples il parle de l’enfant…

Qu’est-ce que ça vient faire là-dedans ?

« Laissez les enfants venir à moi… celui qui n’accueille pas le Royaume de Dieu à la manière d’un enfant n’y entrera pas… »

Pourquoi c’est là, ce texte ? Au milieu de toutes ces règles de répudiation entre hommes et femmes…

Eh bien Jésus remet l’église au milieu du village, il remet l’enfant au milieu de tout cela. En disant aux gens : « Ce n’est pas vos relations entre hommes et femmes, conflictuelles, qui sont essentielles. C’est le fruit d’une bonne relation qui est essentiel, c’est l’enfant. Et si vous n’accueillez pas le Royaume à la manière des enfants, vous n’y entrerez pas. »

Qu’est-ce que ça veut dire ? Les enfants ont le regard pur, innocent.

Si vous ne retrouvez pas, dans vos relations hommes-femmes, ce regard qui ne condamne pas l’autre, qui ne dévisage pas l’autre mais qui envisage l’autre, si vous ne retrouvez pas ce regard purifié entre vous, vous n’entrerez pas dans le Royaume des Cieux !

Les questions relatives aux actes de répudiation, à toutes vos règles, à toutes vos lois sont secondaires ! Retrouvez une bonne relation entre vous, c’est ça l’essentiel !

Vous voyez combien, en méditant ces textes que l’on croit connaître, on les comprend un peu mieux avec le regard de l’enfant, celui qui ne cherche pas les mauvaises choses mais celui qui cherche, au contraire, à envisager l’avenir, à regarder avec pureté, avec innocence, tout cela…

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Aigle, dimanche 3 octobre 2021, 8.30

Aigle, dimanche 3 octobre 2021, 10.00 (version enregistrée)




Laetitia et Lionel

Laetitia et Lionel

avec leurs témoins Sébastien, Valérie, Diana et Pierre

Eglise Saint Georges, Chermignon-d’en-Haut, samedi 2 octobre 2021




Laetitia et Lionel – Homélie de Mariage

Homélie pour le

Mariage de Laetitia et Lionel

Ct 2,8-10.14-16a; 8,6-7a – Ps 148 – Mt 7,21.24-29

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

« Lionel, quand tu reviendras du désert, tu auras trouvé la femme de ta vie ! »…

C’est une parole de Frédéric, le papa de Lionel… Je le dis parce qu’il m’a autorisé à le dire, Frédéric !

Nous avons un nouveau prophète ! Ah oui, clairement, hein !

C’est étrange, le désert, n’est-ce pas ? On s’y découvre beaucoup mieux que ce que l’on croyait en partant…

Xavier, parmi nous le sait bien, il pourrait nous en raconter…

Au désert, on fait des rencontres. pas toujours celles de la joie, au départ !

Un marcheur du désert, un de mes amis prêtres, a l’habitude de dire que le premier jour, dans le désert, l’ennemi c’est la soif. le deuxième jour de marche dans le désert, l’ennemi c’est le soleil. Mais à partir du troisième jour de marche en groupe dans le désert, l’ennemi c’est celui qui marche à côté de moi.

…Bah c’était pas le cas !

Au désert on laisse de côté les apparences…

Laetitia est magnifique aujourd’hui, qui pourrait dire le contraire ? Mais elle était magnifique dans une djellaba, n’est-ce pas Lionel ?

Les apparences comptent peu, au désert. C’est la survie.

On y vient rencontrer le Seigneur, bien sûr, dans le silence, dans la prière, dans l’effort de la marche… mais c’est souvent nous-mêmes que nous rencontrons, sans qu’on l’ait prévu au départ.

Lorsqu’on revient du désert, on sait un peu plus, un peu mieux qui l’on est.

Chacun de vous s’est rencontré, elle-même, lui-même, dans ce désert.

Où vous vous êtes aussi rencontrés tous les deux.

Chacun de vous a fait une troisième rencontre, celle de Dieu, qui partageait déjà votre route et votre vie… Mais on le rencontre plus profondément dans le désert.

On comprend qu’il est le Dieu de ce peuple qui a marché dans le désert.

On comprend mieux qui est Dieu, dans le désert.

Alors… c’est assez surprenant, connaissant leur histoire à tous les deux – le désert – d’avoir choisi cette page d’Evangile que nous venons de réentendre.

Parce que, précisément, on y parle du sable… mais pas en bien !

Construire sur le sable, c’est dangereux, nous dit Jésus dans l’Evangile… ça tient mal. Et quand la tempête survient, la maison s’écroule.

Mais vous n’avez pas construit sur du sable, vous vous êtes rencontrés sur le sable, ce n’est pas pareil.

Et vous vous êtes rencontrés certainement sur le sable de votre vie, aussi. A un moment où les choses n’étaient pas encore très solides pour chacun de vous, chacun à sa manière.

Et c’est dans le désert que vous avez trouvé votre roc. Le roc dont parlait l’Evangile, le roc sur lequel Jésus nous recommande de construire notre maison.

Alors évidemment le roc valaisan est un peu plus stable que le désert africain… et même que la molasse genevoise, hein, soyons clairs !

Le roc de Chermignon, c’est quelque chose ! C’est du solide !

C’est ici, d’ailleurs, que vous construisez. Et la construction, ça connaît les gens d’ici !

Mais ce n’est pas ça, le roc, pour vous. Le roc, c’est ce sur quoi vous construisez votre amour.

L’écoute, la tendresse, l’amour du Christ, l’engagement – un mot qui prend tout son sens aujourd’hui ! – la communication aussi, entre vous, avec vos caractères respectifs, la foi, les passions communes – et elles sont nombreuses !

Une certaine proximité aussi. Pas seulement d’âme ou d’esprit : quand vous côtoyez Laetitia et Lionel, que vous les regardez se donner la main tendrement ou effectuer tous ces petits gestes du quotidien qui passent inaperçus, comme ça, dans la vie courante… mais qu’on remarque… eh bien cette proximité physique, cette tendresse est aussi un roc sur lequel vous construisez.

Je n’ai pas tiré ces éléments de ma tête ou de ma Bible, ce sont vos valeurs, celles que nous avons partagées ensemble en cheminant jusqu’ici.

Vous construisez sur du roc, donc. Et vous construisez à l’aide de ce Dieu que nous avons entendu nous parler dans les textes que vous avez choisis.

L’Evangile, bien sûr. Mais aussi le psaume, ce Dieu qu’on loue !

Et si vous connaissez Laetitia… le jour où elle ne chantera plus, c’est qu’elle chantera là-haut, hein !

La louange… la louange du Seigneur, c’est ce que voulait nous partager le psaume que vous avez choisi.

Et qui le dit très bien : la louange c’est à la fois nos voix mais aussi les montagnes, les collines, les arbres, les cèdres, les animaux…

Tout cela fait partie de votre louange, fait partie de vos raisons de louer Dieu.

Et tout naturellement, cela se retrouvait dans ce texte que nous a lu Nicolas, ce texte qui est l’un des plus osés de la Bible !

Parce que la Bible, vous savez, Chers Amis, c’est une bibliothèque, un ensemble d’une septantaine de livres. Il y a de tout, là-dedans ! Des lettres, des récits historiques, des récits… prophétiques, Frédéric ! Des Evangiles, des proverbes, des chants, il y a de tout dans la Bible !

Et il y a un livre érotique.

Oui… je sais qu’il y en a plusieurs qui vont se précipiter sur leur Bible en rentrant tout à l’heure !

oui… mais pour le comprendre, il faut pratiquer un peu l’hébreu, c’est pas donné à tout le monde ! Et dans nos traductions françaises le Cantique des Cantiques est rendu d’une manière très belle, très douce, très agréable. Mais vous pouvez poser « 50 nuances de Grey », ça n’arrive pas à la cheville du Cantique des Cantiques !

Parce que Dieu nous aime comme ça ! C’est Benoît XVI qui le disait : il y a de l’amour physique dans la manière qu’a Dieu de nous aimer, il y a de l’Eros dans sa manière d’aimer.

Eh oui !

Ce n’est pas pour rien qu’il nous inspire ces gestes que nous réservons à la personne avec laquelle nous scellons notre Amour, nous partageons notre vie. Ce n’est pas pour rien, c’est parce que Dieu nous les inspire !

Et le Dieu du Cantique des Cantiques, c’est le Dieu qui s’exclamait : « Mon Bien-Aimé bondit sur les montagnes ! Il court sur les collines ! Mon Bien-Aimé pareil à la gazelle… »

…Bon, je vous avoue que voir une gazelle en regardant Lionel… il faut un petit peu d’imagination, d’accord !

Par contre, voir la colombe en regardant Laetitia aujourd’hui c’est tout à fait évident. Et c’était la suite du texte : « Lève-toi mon Amie, viens ma colombe ! »

Tout cela vous semble très sage et très prude… je vous épargne la lecture en hébreu et ce qu’elle peut avoir de plus osé.

Mais retenez simplement que la Bible nous parle d’Amour, y compris d’Amour physique, à travers ce texte que vous avez choisi.

Et on en a discuté, vous l’avez choisi en connaissance de cause !

« Car l’Amour est fort comme la mort… sa passion est implacable comme l’abîme… ses flammes sont des flammes de feu… c’est une fournaise divine ! »

Comme le Cantique parle bien de votre Amour, Laetitia et Lionel !

Comme je vous souhaite que cet incendie que le feu du désert a allumé dans vos cœurs ne s’éteigne jamais !

—————————-

Eglise Saint Georges, Chermignon-d’en-Haut (VS)

Samedi 2 octobre 2021




Aggiornamento

Aggiornamento

 

Ah ces mises à jour continuelles sur nos smartphones, nos ordinateurs, c’est parfois épuisant… mais c’est indispensable, on le sait bien, sans quoi l’appareil en question fonctionnera moins bien tôt ou tard. Il en va de même pour l’Eglise. Lors du Concile Vatican II, le mot « mise à jour » se déclinait dans sa version italienne : aggiornamento.

C’est St Jean XXIII qui a utilisé ce terme pour parler de ce que devait vivre l’Eglise à travers le Concile Vatican II. Le mot a souvent été galvaudé, certains poussant sa signification jusqu’à le rendre synonyme de « rupture » quand d’autres y voyaient un simple « dépoussiérage ».

Ni l’un ni l’autre, c’est bien de « mise à jour » dont il s’agit. Exactement comme pour nos appareils numériques et leurs systèmes d’exploitation. Cette mise à jour ne modifie pas l’essentiel, elle n’est donc ni rupture ni réforme en profondeur, mais elle est beaucoup plus qu’un simple dépoussiérage. Elle est nécessaire dans l’Eglise, cette mise à jour, comme dans n’importe quelle institution.

L’Eglise vit de changements

Est-elle synonyme de « changement » ? En fait, oui et non. La mise à jour n’est pas un changement en soi mais elle contient de nécessaires changements. Lequel d’entre nous ne les a pas remarqués, ces changements, dans la nouvelle mise à jour de tel traitement de texte ou de telle application de nos smartphones ?

Ainsi l’Eglise vit des changements réguliers. Affirmer que l’Eglise ne change pas serait faire preuve d’un aveuglement un peu ridicule ou d’une rigidité dont le pape François aime à dire qu’elle rien à faire avec l’ADN du Chrétien lorsqu’il répète que l’expression « on a toujours fait comme ça » doit absolument être bannie de l’Eglise.

L’Eglise de toujours

Dieu est immuable, l’Eglise non. Elle chemine avec son époque tout en n’étant pas de son époque. Elle est dans le monde sans être du monde. Parler d’ « Eglise de toujours » comme on l’entend parfois est très juste si c’est pour dire qu’à travers tous les changements qu’elle traverse, l’Eglise perdure encore et toujours… mais cette expression serait totalement erronée si on l’utilisait pour asseoir une Eglise d’hier et en faire celle de demain, copiée-collée sans aucun changement possible.

L’Eglise est en chemin, comme son fondateur Jésus. Dans un livre savoureux, le poète Christian Bobin qualifiait d’ailleurs le Christ d’ « Homme qui marche », et Dieu que cela lui va bien ! Si l’on regarde les Evangiles, Jésus est toujours en chemin, en effet. Depuis le moment où – passant au bord de la mer – il appelle ses disciples, jusqu’au chemin d’Emmaüs sur lequel, rejoignant les deux disciples, sa première attitude – avant toute parole – est précisément de faire route avec eux.

Synode

Ce cheminement communautaire, ce « marcher ensemble » qui est l’étymologie-même du mot « synode » est intrinsèque à tout Chrétien. Celui qui, par une intransigeance par essence contraire à l’Evangile, souhaiterait revenir en arrière ou simplement figer ses pas pour que rien ne bougeât plus désormais, celui-ci ne serait plus tout à fait dans les traces de notre Dieu qui s’est lui-même identifié comme Chemin (Jn 14,6 : Je suis le Chemin, la Vérité et la Vie). Trois termes indissociables : il n’y a pas « une vérité qui nous précède » mais bien un Chemin de Vie qui se fait en Vérité.

D’ailleurs, les premiers Chrétiens n’étaient-ils pas appelés les « Disciples de la Voie » ?

L’Eglise est donc en chemin constant. Elle effectue régulièrement des mises à jour qui n’ébranlent pas l’essentiel de son identité mais peuvent tout de même sérieusement changer son agir.

Au cœur de la tempête

Les temps tourmentés que nous traversons sont des secousses qui appellent autant de nécessaires mises à jour. Il y en a eu et il y en aura encore. Mais n’importe quel marin vous le dira, au cœur de la tempête et de ses vagues mouvementées, la stabilité ne consiste jamais à ne pas bouger mais bien à épouser le mouvement pour que le gouvernail ne casse pas.

S’adapter constamment, c’est ce que l’Eglise a toujours fait. Ainsi lorsque Vatican II a encouragé la pratique des langues de chaque pays dans la liturgie, plutôt que l’usage du seul latin, elle s’est rapprochée des fidèles pour leur permettre de mieux comprendre au lieu de répéter des mots d’une langue qui leur était étrangère.

La langue de l’Eglise n’est pas le latin

Mais la langue que l’Eglise doit parler n’est ni le latin ni aucune autre langue en usage dans les dictionnaires : la langue de l’Eglise c’est la charité. A des années-lumière de toute intransigeance, la charité est le langage du Christ qui nous met en route à sa suite plutôt que de nous maintenir assis sur les trônes de nos conforts ancestraux. Ces « sièges de devant, derrière les vitres teintées des cardinaux en costume et des donneurs de leçon », comme le chante superbement Francis Cabrel, sont les strapontins de ceux qui attendront vainement une place dans le Royaume des Cieux, là où les premiers seront derniers… et les derniers premiers.

Vincent Lafargue

Publié sur www.cath.ch le 24 septembre 2021




Pierre… m’aimes-tu ?

Petite vidéo biblique expliquant le dialogue entre Jésus et Simon-Pierre en Jn 21,15-17…

 




Réconciliation au bord du Lac

Conférence Evangile à la Maison du 25 septembre 2021 à Fribourg

Réconciliation au bord du Lac

 

Vous trouverez ci-dessous, en téléchargement, le diaporama de la conférence biblique donnée dans le cadre du Forum de l’Evangile à la Maison, le 25 septembre 2021 à Fribourg.

Notez bien que le diaporama n’est qu’un support de la conférence – dans lequel chaque ligne a été considérablement développée oralement. Le seul diaporama ne saurait refléter l’ensemble du discours tenu.

La version audio, seule, rend l’ensemble de l’intervention.

 

VERSION PDF IMPRIMABLE

> Réconciliation au bord du Lac (version augmentée) PDF 

 

VERSION POWERPOINT MODIFIABLE :

> Réconciliation au bord du Lac (version augmentée) PPT

 

ENREGISTREMENT AUDIO DE L’ENSEIGNEMENT :

CHANT AMAZING GRACE PAR SUSAN BOYLE :




Méditer : Marie-Aimer




EDEN-CINEMA, EP09 : Si je reste

Cette mini-web-émission propose des lunettes chrétiennes pour revoir un grand film à frais nouveaux.

Je vous propose de revoir « Si je reste », un film de 2014 qui n’a reçu quasi aucune récompense… et qui est pourtant splendide. Adapté du roman du même nom, « Si je reste » nous emmène aux frontières de la vie et de la mort avec Mia qui va devoir choisir de partir ou de rester.

A revoir absolument, avec quelques clés de lecture données ici…




Framboises et autres petits bonheurs

Photo libre de droits : pixabay

 

Homélie pour le 25e dimanche TO, année B

 

Sagesse 2,12.17-20 / Psaume 53  /  Jacques 3,16–4,3 / Marc 9,30-37

 

NB : En 2021, l’abbé Vincent n’a prêché que dans un contexte privé ce week-end. Voici donc une homélie d’il y trois ans sur les mêmes textes.

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

Quel est votre petit bonheur à vous ? Vous savez, ce qui rend heureux tout simplement, ces petites choses de la vie qui ensoleillent notre existence… Quel est votre petit bonheur ?

Je suis sûr que si on prenait le temps d’écouter vos réponses, il y aurait autant de réponses que de personnes dans cette église.

Pour moi, mon petit bonheur c’est manger une à une quelques framboises au soleil de l’été quelque part, dans notre vallée. Ou alors, si on est en automne comme ce matin, déguster un à un les raisins d’une jolie grappe de chez nous, à la période des vendanges, assis sur un caillou au bord d’un torrent.

Le bonheur, c’est souvent tout simple.

Et pourtant, pourtant, on cherche le bonheur dans des choses parfois bien compliquées, plus chères, plus sophistiquées, dans des lieux plus lointains aussi, alors que notre région est si belle !

Regardez les bonheurs des petits enfants : ils sont tout simples ! Rire aux éclats, se jeter dans l’eau d’une flaque, courir dans le vent, manger à sa faim, faire un câlin à sa maman, à son papa, dormir…

C’est si beau de regarder un enfant dormir…

Et nous on leur offre des jouets compliqués à Noël ou à leur anniversaire, parce que… parce que c’est ce qui fait briller leurs yeux ! Des jouets qui les occuperont quelques temps, avant de passer au jouet suivant, plus compliqué et plus cher que le précédent.

Alors qu’une framboise, une grappe de raisin, une flaque d’eau, ça n’est pas bien compliqué, ça n’est pas bien cher non plus. Et on ne s’en lasse jamais. Même une fois l’âge adulte arrivé.

Le plus sûr mécanisme pour torpiller nos petits bonheurs, c’est la jalousie.

Un sentiment nauséabond, néfaste, malsain… Quelque chose que nous possédons tous – à des degrés divers bien sûr – mais parce que ça fait partie de notre humanité. C’est l’une des plus redoutables armes du démon, la jalousie.

La jalousie nous fait croire que l’herbe est plus verte chez notre voisin. Que sa femme est plus belle que la nôtre, ou son mari, choisissez ce qui vous convient.

La jalousie nous fait croire qu’on a absolument besoin de ce produit que la publicité, juste avant le téléjournal hier soir, nous a vanté.

La jalousie va jusqu’à nous faire croire que les stars vivent mieux que nous.

Alors on achète les magazines qui nous les montrent en couverture, heureux en apparence, bronzés, beaux, célèbres, riches. Et on a les yeux qui brillent… parce que si ce sont les catalogues de jouets qui font briller les yeux des enfants, ce sont les magazines qui font briller les yeux des adultes…

Mes chers Amis… croyez-vous vraiment que les gens très riches vivent plus heureux que vous ?

Croyez-vous vraiment que les gens très connus vivent heureux 

Croyez-vous vraiment que les gens très beaux vivent plus heureux que les autres ?

Vous savez pour la plupart d’entre vous, par mes anciens métiers de comédien et d’enseignant dans une grande école privée, il m’est arrivé de côtoyer des personnes très riches, très belles, très célèbres. Eh bien je vous assure… j’ai rarement vu des gens plus malheureux que ces personnes-là !

Oh, je ne vais pas comparer leur malheur à ceux qui n’ont pas à manger, entendons-nous bien ! Mais ces gens n’étaient pas heureux, non…

Parce que plus vous êtes visibles, plus on vous envie, plus on veut vous attirer dans un piège, exactement comme le disait le livre de la Sagesse, notre première lecture.

Et plus l’on possède, plus l’on a de richesses, de gloire, de beauté, plus l’on est jaloux ! Ce défaut contre lequel nous mettait en garde à la fois la lettre de Jacques, notre deuxième lecture, et Jésus dans l’Evangile.

Jésus, dans cet extrait de l’Evangile de Marc que nous avons ré-entendu ce matin, nous invitait à laisser de côté tout cela. Il fustigeait la jalousie entre ses disciples qui se disputaient pour savoir qui d’entre eux devait avoir la première place, lequel était le plus grand.

Et Jésus renverse tout. Le plus grand, avec lui, ce n’est pas le plus grand aux yeux du monde. Ce n’est pas le plus riche, ce n’est pas le plus beau, ce n’est pas le plus célèbre…

Le plus grand, avec Jésus, c’est celui qui se fait le plus petit, le plus humble, le plus discret, le plus simple, le plus pauvre… Celui qui se fait le serviteur de son prochain…

Le plus grand, avec Jésus, c’est le plus petit.

Et Jésus nous propose de retrouver notre âme d’enfant. D’accueillir, comme lorsque nous étions petits, les bonheurs simples de l’existence.

Le vrai bonheur, je le crois fermement, chers Amis, est tout simple ! Il ne s’embarrasse pas des standards du soi-disant bonheur de notre monde. Il est souvent à aller chercher dans ce que nous avons aimé déjà quand nous étions tout petits : une framboise au soleil, quelques raisins au bord d’un torrent…

Vos petits bonheurs à vous, aussi…

Alors dites-moi… c’est quoi ce petit bonheur que vous aviez quand vous étiez petits, et que vous pourriez retrouver facilement, cet après-midi par exemple ?

C’est quoi, votre petit bonheur ?

Ne l’oubliez pas ! il fait vivre l’enfant qui est en vous…

Et si nous ne redevenons pas comme cet enfant, disait Jésus, nous n’entrerons pas dans le Royaume des Cieux !

Le bonheur, finalement… c’est tout simple !

Alors Chers Amis, je vous pose la question – et je vous la laisse en méditation – ne sommes-nous pas heureux ?

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Vex, 22 septembre 2018, 18.30

Hérémence, 23 septembre 2018, 10.00 (version enregistrée)

 




Cliquer : un moment sacré

 

www.unmomentsacre.com 

 

La spiritualité jésuite s’appuie sur ce qu’avait compris St Ignace de Loyola : Dieu agit dans le cœur humain… à condition qu’on lui en ouvre la porte. Un site propose – en 21 langues s’il vous plaît ! – de consacrer un moment de notre journée à Dieu et nous donne des outils très simples pour ce faire : unmomentsacre.com 

 

Un moment en 6 étapes

 

Pas besoin de longs temps de méditation ici. Une technique, très simple, et la certitude de trouver chaque jour sur ce site de quoi nourrir un moment de prière.

La technique consiste en six étapes : (1) prendre d’abord un moment pour se mettre en présence de Dieu, où que nous soyons, y compris devant notre écran ; (2) libérer le trop plein de nos cerveaux ou de nos cœurs pour accueillir Dieu ; (3) examiner ce qui nous vient à l’esprit, ce que notre conscience nous dit ce jour-là ; (4) lire l’Evangile du jour, proposé sur le site ; (5) parler très simplement à Jésus de ce que nous dit ce texte, de lui, de nous ; (6) faire une brève prière de conclusion.

 

Pas nouveau… et toujours renouvelé

 

Le principe de la méditation ignatienne n’est pas nouveau. Pourtant, parce qu’il nous offre d’ancrer solidement chacun de nos moments de prière dans l’aujourd’hui de notre vie, dans un vrai dialogue avec le Christ, nous ne le vivons jamais deux fois de la même façon. Ainsi, ce site internet n’est pas nouveau (il date de 1999) mais il offre chaque jour de la nouveauté à qui veut bien le visiter.

 

Alors… allons-nous consacrer un moment au Christ aujourd’hui ?

 

Abbé Vincent Lafargue

Publié dans “Grandir”, 2021-5, rubrique “Cliquer”




Et dehors la vie continue

Film documentaire de Daniel Maurer

Avec Frédérique Dupont-Giraud, Eric Carteau, Giuseppe Garieri

Sortie en Suisse : 15 septembre 2021

 

L’Hôpital Riviera Chablais (HRC)

Pudeur remarquable

Soutien aux soignants

Peu de publicité : allez-y !

https://etdehors.ch/wp/

Bande annonce :




Qui est le Christ que je veux suivre ?

Photo libre de droits : pixabay

 

Homélie pour le 24e dimanche TO, année B

Isaïe 50,5-9a / Psaume 114  /  Jacques 2,14-18 / Marc 8,27-35

 

NB : en 2021 l’abbé Vincent a prêché ces mêmes textes dans des messes spécifiques pour les enfants, l’homélie n’était pas enregistrable. Voici une homélie au sujet des mêmes textes prononcée il y a trois ans.

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

Qui suis-je ? …

Ah j’ai entendu, là, mon prénom et mon nom – « Vincent Lafargue », ça me définit, oui, je suis d’accord… Mais encore ? « Le curé »… ah, oui, ça me définit aussi…

Mais on peut aller plus loin. En Valais on se définit souvent par la filiation : « T’es le fils à qui ? » A cela, je dois répondre : « Je suis le fils à Jacques et à Marie-José » qui sont les prénoms de mes parents.

On peut aussi se définir par le terrain : « T’as où les vignes ? » Hélas nulle part. Ma famille n’a pas de terres et moi non plus.

Ou par la possession du bétail : « T’as où les vaches ? » Nulle part non plus me concernant, je ne possède pas de bétail, pas de terrain, et c’est bien ainsi. A mon humble avis un prêtre n’a pas à se définir par ce qu’il possède mais par ce qu’il donne aux autres.

Prêtre, voilà quelque chose qui me définit aussi.

Je peux me définir aussi par mon grade académique, alors là ça en imposera beaucoup : master en théologie biblique, ça fait tout de suite très sérieux. Mais quelle importance ?

Je pourrais me définir aussi par mon deuxième prénom, Jean-Jacques, c’est le prénom de mon Parrain qui est au ciel maintenant, j’ai donc d’autant plus de bonheur à le redire parce que ça le fait vivre…

Je pourrais me définir par les différents pseudonymes que j’utilise dans certains journaux pour écrire… mais si je vous les disais, ce ne serait plus des pseudonymes, évidemment !

Je pourrais me définir comme un amoureux de la calligraphie, de la poésie, de la nature… Comme un solitaire – ça tombe bien puisque j’ai fait vœu de célibat. Comme un amoureux du silence aussi, du cinéma. Tout cela me définit.

Et je pourrais faire le même exercice avec chacun de vous !

Nous ne nous résumons évidemment pas à notre prénom ou à notre nom, ni à notre filiation, ni à nos vaches, ni à nos vignes ! Il y a des dizaines et des dizaines de façons de parler de chacun de nous, de nous définir.

Je vous en propose une que j’aime beaucoup, qui peut nous convenir à chacune, à chacun, je crois : je suis… un pécheur, tout simplement.

C’est la réponse qu’avait donnée le pape François à sa toute première interview, le lendemain de son élection, quand un journaliste lui a demandé « Qui est le pape François ? » Il a répondu, du tac au tac : « Un pécheur. »

Et c’est juste ! ce n’est pas pour nous rabaisser, mais c’est simplement pour dire que ça fait partie de notre humanité !

On ne fait pas toujours le bien que l’on voudrait, on commet des péchés, c’est une évidence… c’est une évidence ! Le plus grand pécheur serait sans doute celui qui prétendrait ne jamais en commettre !

Cette question – qui suis-je ? – est posée par Jésus à ses disciples, dans l’Evangile, vous l’avez entendue.

Et Pierre croit connaître la bonne réponse. Il en a une, d’ailleurs, mais elle ne suffit pas. Il dit « Tu es le Christ ! ». C’est du grec, « Christ », ça veut dire « celui qui a reçu l’onction d’huile, l’onction sacrée ». En hébreu ça se dit « Mashiah », et vous connaissez aussi le nom que cela a donné en français : Messie.

Christ et Messie, c’est la même chose, en fait, hein ! C’est simplement que cela vient de deux langues différentes. Mais c’est celui qui a reçu l’onction, la marque d’huile.

…Mais alors dites-moi… chers Amis… c’est votre cas à tous, non ? Vous avez tous reçu la marque de l’huile sainte à votre baptême. Et même, pour la plupart d’entre nous, nous l’avons reçue à nouveau à notre confirmation.

Nous sommes TOUS des Messies ou des Christs, dans ce sens-là.

Alors bien sûr, pour nous, Chrétiens, il n’y en a qu’un, c’est Jésus. Nous, nous nous contentons d’essayer d’aller à sa suite, de marcher dans ses pas. Mais nous avons reçu l’onction ! ne l’oublions pas, soyons-en fiers ! Mais faisons-lui honneur, aussi, à cette onction…

Et puis posons-nous la question : « Qui est-il, ce Christ pour nous ? » Que répondriez-vous à cette question ? Qui est Jésus pour vous ?… je vous écoute…

–      Un Frère.

Un frère… voilà certainement une excellente réponse…

–      Un Chemin.

Un chemin, il le dit lui-même : « Je suis le Chemin, la Vérité, la Vie… » ah… je viens de vous en donner deux autres, du coup ! Mais encore ?

–      Un meilleur Ami

Un meilleur Ami, mais oui !…

« Mon Amoureux », comme je le disais aux enfants hier soir…

Mais nous sommes un peu comme les disciples, vous avez remarqué ? Nous donnons de belles réponses. Et tant mieux !

Mais il y a une part de son identité qu’on n’aime pas voir… Regardez la croix. il ne faut pas oublier trop vite cette identité-là : le Christ, pour nous, c’est aussi le Serviteur qui a souffert, qui est mort POUR NOUS.

La première lecture nous le dépeignait, ce serviteur qui souffre. Le prophète Isaïe était visionnaire, il avait compris ce qui allait arriver.

Et quand Jésus veut le rappeler à Pierre, vous l’avez entendu, « Pierre lui fait de vifs reproches »…

Dans l’Evangile de Marc, on n’a que ça. Dans d’autres Evangiles on a carrément la réplique : « Mais non ! ça ne t’arrivera pas, c’est pas possible ! » Et Jésus a cette réplique terrible : « Passe derrière-moi, Satan ! » … Tu veux m’éviter ce qui est inévitable ? C’est pas du jeu ! Je dois passer par la mort.

Et c’est un des points communs que nous avons tous : nous devons passer par la mort, et souvent par d’autres croix dans nos vies. Vouloir les éviter, c’est diabolique ! Jésus le dit très bien, dans sa réplique…

C’est pas pour ça qu’il faut les chercher, non plus, hein ! Mais il faut les affronter, les croix de nos vies, parce que c’est cela aussi, l’identité que Jésus nous donne : « Si quelqu’un veut me suivre, qu’il prenne sa croix et qu’il marche… »

Qui est Jésus, pour moi ? Pour chacun de nous ? Posons-nous tous la question, chers Amis…

Et quelle que soit notre réponse à nous, qu’elle nous pousse à nous mettre en marche derrière lui, derrière le Christ, derrière Jésus, et aussi donc à agir en Chrétiens.

C’est Jacques qui nous le rappelait, dans la deuxième lecture.

Si vous dites : « J’ai la Foi, j’ai la Foi, oui, oui, oui, oui, moi je suis Chrétien, vous savez, mais je suis non pratiquant ! » – c’est pas votre cas, hein, puisque vous êtes là ce matin ! Mais on l’entend cette phrase, Dieu sait si on l’entend ! « Moi, vous savez, je suis chrétien non pratiquant… » Moi aussi : je suis nudiste non pratiquant ! Non, je pratique pas, non ça ne m’intéresse pas du tout…

Imaginez un skieur qui dit : « Vous savez, moi je suis skieur ! Mais je ne fais pas de ski, hein ! Non, non, non, je fais du foot, l’été… Je suis skieur non-pratiquant…» C’est absurde !

Imaginez un joueur de foot qui dit : « Ah oui oui oui, moi je fais du foot, hein… à l’entraînement le mercredi ! Mais je ne vais jamais au match le dimanche, ah non, alors ça, faut pas me le demander… » Il s’entraîne mais il ne joue pas… c’est absurde !

C’est le cas de bon nombre de personnes autour de nous, Chers Amis… « Ah oui oui oui, moi je sais les prières, hein ! Mais faut pas me demander d’aller à la messe, alors ça non ! » Absurde… Complètement absurde !

Alors bien sûr, pratiquer ce n’est pas SEULEMENT pratiquer les sacrements. C’est la chose la plus importante, mais c’est pas la seule !

Pratiquer c’est aussi, et peut-être même d’abord, pratiquer dans notre vie, pratiquer la charité, pratiquer les enseignements du Christ autour de nous, avec les gens qui nous entourent, pratiquer le partage comme on le fera en cette fête de jeûne fédéral.

Suivre le Christ, au fond, je crois que c’est agir de telle manière qu’il soit impossible à ma seule vue de croire que le Christ n’existe pas.

C’est une phrase de Mère Teresa : « agir de telle manière qu’à ma seule vue il soit impossible de croire que Dieu n’existe pas… »

C’est tout l’effort que je nous souhaite, à vous comme à moi.

 

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Vex, samedi 15 septembre 2018, 18.30

La Gietty, dimanche 16 septembre 2018, 10.00 (version enregistrée)

Praz-Jean, dimanche 16 septembre 2018, 16.00

Euseigne, dimanche 16 septembre 2018, 19.00




Donnons la parole aux enfants (vraiment !)

Photo libre de droits : publicdomainpictures – George Hodan

 

Homélie pour le 23e dimanche TO, année B

Isaïe 35,4-7a / Psaume 145  /  Jacques 2,1-5 / Marc 7,31-37

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

A entendre ces textes, vous vous dites peut-être que les miracles dont ils parlent… on ne les voit pas tous les jours ! Un aveugle qui voit, un muet qui parle, un sourd qui entend, un boiteux qui marche normalement… ça arrive hein, encore aujourd’hui, les miracles… mais enfin c’est relativement rare, on est bien d’accord !

Mais… qui est aveugle ? …qui est sourd ? …qui est muet ? …qui est boiteux ? …Je laisse cette question en suspens et je vous raconte une petite histoire.

Dans un de ces jeux de société bien connu où l’on doit dessiner un mot et le faire deviner aux personnes qui sont autour de nous, un petit enfant a reçu comme mission de dessiner un muet et de dessiner un sourd.

Pas facile, hein ! Posons-nous la question : comment est-ce qu’on aurait dessiné ça, nous ?

Le petit enfant a d’abord dessiné un tout petit personnage. Et puis ensuite un très grand personnage. Et il s’est arrêté.

Quand on lui a demandé d’expliquer son dessin, ce qu’il avait voulu dessiner – parce que, bien sûr, son équipe n’avait rien compris – on a été très surpris…

« Le muet, a dit l’enfant, il est tout petit, il est comme moi… c’est un enfant. Et le sourd, c’est une grande personne. »

Et devant l’auditoire ébahi, il a poursuivi :

« Parce que les enfants… on n’a pas le droit à la parole. Et parce que, de toutes façons, les adultes n’écoutent jamais. »

Intéressant…

Surtout quand on se souvient que le mot « enfant » vient du latin « infans », « celui qui ne parle pas »… ça vient de loin, hein… que les enfants n’ont pas le droit à la parole. Ça vient de loin !

Alors je ne dis pas, Chers Amis, qu’il faut écouter et appliquer systématiquement tout ce que nous disent les enfants !

Si on leur passait chacun de leurs caprices, on créerait un monde d’enfants-rois… on en connaît quelques-uns… c’est pas toujours beau à voir !

Je ne dis pas non plus, à l’inverse, que les adultes n’entendent jamais ce que disent les enfants. Dieu merci. Il y a des parents, des grands-parents parmi vous et j’espère bien que vous écoutez ce que nous disent nos enfants, nos petits-enfants.

Mais tout de même… je me dis que, parfois, les adultes – et je m’inclus dans le lot ! – les adultes me semblent entendre leurs propres désirs et masquent la réalisation de ces désirs derrière de soi-disant bonheurs d’enfants auxquels, en réalité, on n’a jamais donné la parole pour connaître leur avis.

Avez-vous souvent vu, vous, un enfant interrogé par les médias sur tel ou tel sujet d’actualité ? Ou en vue de telle ou telle votation ?

Moi non.

On interroge les adultes, on fait des sondages… alors pour ça, on est très-très forts !

Mais qu’est-ce que ça donnerait si on interrogeait un jour les enfants ?

On nous dit savoir ce qu’ils pensent. Les deux camps, d’ailleurs, de tel ou tel projet de loi prennent parfois en otage l’intérêt suprême de l’enfant… et même parfois on vote en leur nom.

Mais est-ce qu’on leur donne la parole pour avoir la moindre idée de ce qu’ils pensent, eux ?

Peut-être qu’on a peur de ce qu’ils pourraient nous dire… Peut-être qu’on a peur de découvrir qu’on est le grand personnage, sur le dessin, celui qui n’entend pas… Alors ce sont nous, les sourds. Et aveugles, parfois, aussi, du coup.

Nous tombons, il faut bien le reconnaître, sous le coup de ce que nous expliquait Jacques, dans la deuxième lecture : nous jugeons sur les apparences. Si ça, ce n’est pas être aveugle, qu’est-ce donc ?

L’expérience des « camps vocations », Chers Amis, ce sont ces séjours magnifiques organisés en Suisse Romande pendant lesquels on amène les jeunes à réfléchir à leur vocation – parmi toutes les vocations, pas seulement les vocations religieuses, époux, épouse c’est une vocation – l’expérience de ces camps pendant des années m’a appris au moins une chose : il faut absolument donner la parole aux enfants et aux jeunes.

Parce qu’ils ont BEAUCOUP à nous dire. Ils parlent souvent très-très bien de Dieu, pour peu qu’on les laisse parler… ils parlent souvent très-très bien de l’Amour pour peu qu’on les laisse en parler. Est-ce qu’on ne parle bien que de ce que l’on connaît ? Ben la preuve que non !

Pourquoi ne parleraient-ils pas bien d’autres sujets très importants ? Pourquoi ne leur donnons-nous pas la parole ?

Et ensuite, une fois qu’on les a entendus, évidemment il ne faut pas balayer du revers de la main ce qui ne nous revient pas dans ce qu’ils ont dit, ce qui nous semble inapproprié !

Parce que ce sont eux, les adultes de demain. Nos décisions d’aujourd’hui, c’est eux qui devront en porter le fardeau demain.

Ce n’est pas pour rien, je crois Chers Amis, que l’une des plus redoutables colères de Jésus concerne le jour où l’on a voulu écarter de lui des enfants qui voulaient venir jusqu’à lui.

On retient toujours la colère des « marchands du temple »… mais cette colère-ci était redoutable aussi !

« Laissez venir à moi les enfants ! » disait Jésus… « Le Royaume des Cieux est à ceux qui leur ressemblent ! »

Sous-entendu pas à nous, hein, du coup !

Ce messie qu’annonçaient les prophètes, qu’annonçait le prophète Isaïe dans notre première lecture, celui qui allait ouvrir les yeux des aveugles, faire entendre les sourds, faire marcher les boiteux, faire parler les muets, ce messie, c’est Jésus, nous le savons bien !

Et l’Evangile confirme cela : oui, il ouvre les yeux des aveugles, il fait parler les muets il fait entendre les sourds, oui, c’est bien lui !

Mais à chaque fois que je relis ces textes, je me pose encore et toujours la question : qui est-ce, l’aveugle ? Qui est-ce, le sourd ? Ne serait-ce pas moi… parfois… souvent ? Et si le sourd c’était l’adulte ? Et si le muet c’était l’enfant ?

Jésus, alors, serait là aussi, aujourd’hui, pour m’ouvrir les yeux, moi l’aveugle, sur la réalité qui m’entoure… pour m’aider, moi le sourd, à entendre ceux à qui on ne donne jamais la parole, et pour donner la parole à ces plus petits qui sont ses frères…

Donnons la parole à nos enfants, Chers Amis… de toute urgence ! Ça commence à la table de nos maisons, dans nos fêtes de famille… Ça commence par ne pas dire : « Oh ça, c’est une discussion d’adultes ! »… avec un regard un peu méprisant, vous savez ?

Donnons-leur la parole dans notre quotidien, écoutons ce qu’ils ont à nous dire !

Peut-être qu’alors un jour, dans quelques années, quand on demandera à un enfant de dessiner un muet, il dessinera une grande personne avec de grandes oreilles, parce qu’enfin les adultes auront appris à se taire et à écouter ce que les plus petits ont à leur dire.

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Les Diablerets, samedi 4 septembre 2021, 18.00




Le gel hydroalcoolique pour la langue

Photo : morand.ch

 

Homélie pour le 22e dimanche TO, année B

Deutéronome 4,1-2.6-8 / Psaume 14 / Jacques 1,17-18.21b-22. 27 / Marc 7,1-8.14-15.21-23

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

 

Il y a encore quelques années, si j’avais sorti ceci devant vous [sort un gel hydroalcoolique] seules les personnes appartenant au monde médical parmi vous auraient su me dire qu’il s’agit de gel hydroalcoolique.

Pour la plupart d’entre nous, nous ne connaissions pas cela.

Aujourd’hui tout le monde connaît, tout le monde !

Et non seulement on connaît mais on sait même que tel gel colle aux mains, que tel autre devient gluant quand on le passe sous l’eau, que tel autre encore a une odeur épouvantable… ce qui n’est pas le cas du mien qui est à la Williamine et à la menthe, je vous recommande.

Je vous recoMorande même, si j’ose dire…

Non seulement nous savons cela mais, ce qui est plus essentiel, nous savons aussi utiliser ce gel.

On a tous appris à se laver correctement les mains, vous êtes d’accord ? Ah oui ! Jadis, peut-être que tout comme moi, vous vous laviez les mains en cinq secondes chrono.

Aujourd’hui on sait que cela prend du temps, on connaît les gestes exacts à faire pour ne laisser aucune chance à un quelconque variant du CoVid, même le plus petit, même le variant appenzellois qui va apparaître tôt ou tard, on ne laisse aucune chance au CoVid parce qu’on sait maintenant se laver les mains.

Ça fait donc tout drôle de réentendre la page d’Evangile que nous venons d’entendre : les Pharisiens fustigent les disciples de Jésus parce que précisément ils ne se lavent pas correctement les mains avant de manger.

Du coup, du haut de nos deux années passées, on a clairement envie de dire à Jésus : hé, oh, Seigneur, les gestes barrières ! Vous n’avez pas vu l’affiche ? On se lave les mains !

Mais le débat est tout à fait ailleurs, Chers Amis, dans ce texte.

Bien sûr que Jésus, s’il revenait aujourd’hui avec ses disciples, se laverait correctement les mains et qu’il utiliserait ce genre de choses, évidemment.

Mais la question n’est absolument pas là.

Ce qu’il reste à inventer – et c’est ça le thème de cet Evangile – c’est le gel hydroalcoolique pour la langue.

Ne le faites pas avec ça, hein ! ça va vous emmener tout droit à l’hôpital !

Mais pourtant c’est la langue qu’il s’agit de purifier dans les textes que nous avons entendus.

Déjà à l’époque de Jésus c’était nécessaire. Il le dit aux Pharisiens, vous l’avez entendu : ça n’est pas tellement ce qui entre dans votre bouche qui est impur, c’est plutôt ce qui en sort. A chaque fois que vous critiquez, que vous jugez l’autre, c’est ce qui sort de votre bouche qui est impur.

Ça me rappelle nos grands-mamans qui lavaient les langues de leurs gamins au savon lorsqu’un vilain mot en sortait ! Peut-être que certains d’entre vous ont connu ça…

Et c’est vrai, le gel hydroalcoolique pour la langue, on ne l’a pas encore inventé. Et ça fait plus de deux mille ans qu’on en parle.

Parce que c’est bien joli de respecter les commandements à la lettre. C’est ce que faisaient les Pharisiens, les Docteurs de la Loi, ils respectaient les commandements à la lettre !

Mais encore faut-il ne pas enfermer les autres en les jugeant parce qu’ils ne font pas tout à fait comme-ci ou tout à fait comme-ça.

C’était déjà le cas du temps de Jésus. Il critiquait les Pharisiens, les Docteurs de la Loi, parce qu’ils enfermaient les autres dans le respect absolu de la moindre petite règle qui existait alors. Et il y en avait beaucoup !

La Loi est importante, d’ailleurs Jésus le dit dans un autre Evangile, il ne s’agit pas de l’abolir. Mais il faut lui donner du sens…

La Loi est faite pour que l’homme vive, pour qu’il respire, pour le rendre libre ! Pas pour l’enfermer.

Dieu nous a laissé des lois magnifiques, notre première lecture le disait très bien, le livre du Deutéronome. Avec ce conseil venu de Dieu que nous avons réentendu : vous garderez ces commandements, vous les mettrez en pratique avec sagesse.

Avec sagesse… ça sous-entend avec discernement, sans enfermer l’autre.

Et Jacques, dans la deuxième lecture, nous rappelait que les dons les plus parfaits viennent de Dieu, donc les commandements en font partie, évidemment.

Mais il ne suffit pas de les connaître ni de les appliquer à la lettre. Il faut encore mettre un frein à sa langue.

Et ça, c’est le psaume qui nous le redisait tout à l’heure : celui qui veut agir parfaitement met un frein à sa langue.

Or je ne sais pas si vous avez remarqué, Chers Amis, comme la pandémie a exacerbé la critique… Il paraît qu’il n’y a jamais eu autant de dénonciations qu’en ce moment. A faire pâlir les collabos de la deuxième guerre mondiale, dites donc !

On voit quelqu’un qui ne met pas son masque, la première chose qui nous vient en tête c’est de le critiquer ou de le dénoncer.

Enfin je dis « nous », j’espère que vous n’êtes pas comme ça…

On voit quelqu’un qui ne se lave pas correctement les mains en entrant dans un magasin, même chose !

Il y a même une police du CoVid, dites donc.

Alors ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : je travaille en aumônerie d’hôpital, je vois le CoVid, je l’ai attrapé moi-même, je vois des gens mourir, c’est une saleté. Vraiment, c’est une belle saleté. Sur ce coup-là, le diable a fait très fort !

Il faut appliquer les gestes-barrières, il faut être intelligents ensemble, évidemment.

Mais ce n’est pas pour cela qu’il faut se transformer en Pharisiens-Docteurs de la Loi en fustigeant tous ceux qui ne font pas exactement comme il faut et en les dénonçant… Je ne crois pas que Jésus aurait fait une chose pareille.

On met un frein à notre langue. On lave notre bouche avec le gel hydroalcoolique de l’amour du prochain, et on se calme !

C’est ensemble qu’on traversera tout cela, ce n’est pas en dénonçant notre prochain !

Parce que la pandémie tue, c’est évident. Mais la critique aussi ! Le jugement tue plus sûrement que n’importe quoi d’autre, surtout s’il est public ! La dénonciation tue, à coup sûr !

Or « tu ne tueras pas », jusqu’à nouvel avis, c’est un commandement. Un de ceux qu’on ne négocie pas d’ailleurs, qui n’est pas discutable.

Donc, Chers Amis, je crois qu’une des choses qu’il nous faut porter à l’extérieur de ces murs en ces temps difficiles, douloureux – en ces temps où il ne faut pas relâcher nos efforts, évidemment non… – mais je crois que ce qu’il nous faut porter à l’extérieur c’est qu’on y arrivera ensemble. Pas en se dénonçant les uns les autres, pas en se critiquant les uns les autres…

Puisque nous avons si bien appris à nous laver les mains avec ceci… puissions-nous désormais apprendre à nous laver la langue, le cœur et l’âme, avec le gel hydroalcoolique de l’Amour.

Le monde ira mieux… et nous aussi je pense.

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Champex, samedi 28 août 2021, 17.00




Samantha et Cyrille

Samantha et Cyrille

avec leurs témoins Aurore, Lydia, Yann et Thomas

Le Crêtet, samedi 28 août 2021




Samantha et Cyrille – Homélie de Mariage

Homélie pour le

Mariage de Samantha et Cyrille

Ct 2,8-10.14-16a; 8,6-7a – Ps 127 – Mt 19,3-6

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Voilà, Chère Samantha, Cher Cyrille, on vient d’écouter quelques textes de la Bible, ceux que vous avez choisis… et la Bible, vous savez, Chers Amis, c’est l’album de famille des Chrétiens.

À chaque fois que cette immense famille – oui elle est immense, 2 milliards et demi de personnes sur la Terre c’est pas mal ! – chaque fois que cette immense famille se rassemble pour un moment joyeux notamment, comme aujourd’hui, eh bien on ouvre l’album de famille.

Et comme notre album de famille est un livre sacré, il a un grand avantage c’est qu’il nous parle toujours d’aujourd’hui.

La Bible, ce ne sont pas des vieux textes poussiéreux : à chaque fois qu’on l’ouvre, elle nous parle de ce que l’on vit aujourd’hui.

Ces textes que nous venons d’entendre nous ont donc parlé de vous deux, de toi Samantha et de toi Cyrille.

Oh c’était tellement évident avec la première lecture que nous a lue Marie-Jeanne, le Cantique des Cantiques ! Quand Cyrille entend « mon amie, ma toute belle, ma colombe à la voix douce et au visage charmant », comment ne pas penser à Samantha ?

Je vous avoue que l’inverse est un petit plus difficile à concevoir d’emblée… parce que c’est vrai que quand on entend « mon bien-aimé pareil à la gazelle », on a plus de mal à voir Cyrille en gazelle !

Bon, comme me l’a dit Marie-Jeanne tout à l’heure, « il y a une biche là-dedans donc la chasse n’est pas loin », sauf que si je lis bien le texte, le petit de la biche c’est le bien-aimé, donc c’est Cyrille, donc la biche c’est Marie-Jeanne… donc il vaut mieux qu’il ne lui arrive rien de mal tout de suite là maintenant. Pour la chasse on repassera plus tard !

C’est bien de vous deux dont parle ce texte, de la nature aussi, que vous aimez tant.

Et quand ce texte dit « l’amour est fort, ses flammes sont des flammes de feu, c’est une fournaise divine et même les torrents ne pourront éteindre l’amour » je crois qu’il parle de votre amour à tous les deux.

Même le Durnand à la fonte des neiges ne peut éteindre l’amour qu’il y a entre vous deux. Et j’aime mieux vous dire que le Durnand à la fin du printemps c’est du lourd, hein !

Celles et ceux qui ne connaissent pas parmi vous, vous irez jeter un coup d’œil en redescendant, dans les gorges, vous verrez que c’est pas rien !

Après cette première lecture qui parlait de nature on a entendu Lydia nous partager le psaume. Et là ça mérite un mot d’explication. Parce qu’à plusieurs reprises le texte que Lydia nous a lu disait que Cyrille craint le Seigneur.

Eh oui, si ce psaume parle de vous deux, on a entendu « heureux qui craint le Seigneur, sa femme sera dans sa maison comme une vigne généreuse, et ses fils autour de la table comme des plants d’Olivier, voilà comment sera béni l’homme qui craint le Seigneur ».

Alors pour le reste de la phrase, pas de souci, voir Samantha comme une vigne généreuse, je veux bien, parler de vos fils comme des plants d’olivier… on ne sait pas si ce sera un fils ou une fille pour l’instant… comme ça ceux qui sont là savent, maintenant… [je précise que j’avais reçu l’autorisation des mariés de le dire 😊] mais les voir comme des plants d’olivier, les enfants que Dieu vous donne, c’est sûrement une chose très juste ! Des plants d’olivier, c’est des êtres qui répandent la paix autour d’eux, et ça c’est tout le bonheur qu’on vous souhaite pour eux…

Mais dire de Cyrille qu’il craint le Seigneur… Mmmh vraiment ? Il est charpentier en plus ! À priori il devrait plutôt bien s’entendre avec Jésus !

Oui mais dans la Bible, Chers Amis, « craindre » ça ne veut pas du tout dire « avoir peur ». En français on a un petit peu gommé la différence entre ces deux verbes, pour nous la crainte et la peur, en gros c’est la même chose. Mais pas dans la Bible.

Il ne faut jamais avoir peur de Dieu, vous le savez bien tous les deux. Par contre il est bon de le craindre. Alors qu’est-ce que ça peut vouloir dire ?

La crainte, dans la Bible, c’est le respect filial. C’est voir Dieu comme notre père – or on n’a pas peur de notre père, enfin j’espère ! – on le respecte, on écoute sa voix, on prend conseil auprès de lui mais on n’a pas peur de lui.

Voilà la bonne attitude à avoir avec Dieu, et ça, dans la Bible, ça s’appelle la crainte du Seigneur.

Vous le saurez, désormais ! Quand vous entendrez la « crainte du Seigneur » dans la Bible, vous saurez que ce n’est pas la peur, pas du tout ! C’est le respect…

Et je crois que ça, ça colle à Cyrille. J’espère que tes enfants auront cette même relation avec toi d’ailleurs, qu’ils te craindront au sens biblique du terme c’est à dire qu’ils n’auront jamais à avoir peur de toi ni de leur Maman mais qu’ils te respecteront, qu’ils vous écouteront, qu’ils vous craindront dans le bon sens.

À partir de maintenant, Chère Samantha, Cher Cyrille, enfin dans quelques minutes quand vous aurez dit oui devant Dieu, vous ne ferez qu’un, comme le disait le troisième texte que vous avez choisi, l’Evangile, et que nous avons entendu il y a quelques minutes.

Vous ne ferez plus qu’un… et en même temps vous serez trois !

Je ne parle pas seulement de l’heureux événement que vous attendez, je parle de Dieu. C’est Dieu, le troisième, d’abord.

Puisque vous avez choisi de placer ce mariage sous son regard, de lui demander sa force, en retour, lui, il fait partie de votre couple, pleinement. Et il vous offre aussi sa présence, sa fidélité, son entraide, sa sincérité, son amour, ça ne vous dit rien, ces mots ? Mais oui, ce sont les piliers qu’on a partagés ensemble, ce sont vos piliers, ce sont vos valeurs, celles sur lesquelles vous construisez votre couple, et Dieu vous les offre : sa présence, sa fidélité, son entraide, sa sincérité, son amour et même sa famille. Toutes ces valeurs qui sont les vôtres.

Il sera toujours là avec vous. À vous d’être toujours aussi avec lui. Alors votre amour à tous les deux durera jusqu’à la mort, et même le Durnand en furie ne pourra pas en éteindre les flammes !

Longue vie à tous les deux !

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Chapelle St François d’Assise, Le Crêtet (Bovernier, VS)

Samedi 28 août 2021




Premier ou première de cordée

Photo libre de droits : pxhere

 

Homélie pour le 21e dimanche TO, année B

Josué 24,1-2a.15-17.18b / Psaume 33(34) / Ephésiens 5,21-32 / Jean 6,60-69

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis…

 

J’aimerais tout d’abord que vous essayiez de penser dans votre esprit à une image. Une image que nous connaissons bien dans nos montagnes, une cordée.

…Vous l’avez ?

Il y a là plusieurs alpinistes, hommes et femmes, qui s’avancent prudemment sur un glacier. Ils ont mis leurs crampons car la pente est conséquente, et ils se sont encordés.

L’intérêt de la corde qui relie tout le monde n’est pas du tout que celui qui chute entraîne toute la cordée mais bien au contraire, vous le savez bien, que la force de tous les autres permettra de retenir celui qui viendrait à dévisser.

C’est pour cela qu’on s’encorde. La corde nous rend solidaires les uns des autres.

Si l’un tombe dans une crevasse, on n’a pas le choix : soit l’on tire tous ensemble à la corde, et on le remonte, soit on abandonne et c’est la mort assurée pour toute la cordée.

C’est ainsi que nous suivons le Seigneur : plutôt mourir que d’abandonner disait très justement le livre de Josué, notre première lecture.

Mais si je vous ai demandé d’imaginer cette cordée c’est surtout pour parler de la deuxième lecture. Ce texte qui nous fait tellement mal aux oreilles à l’ère « metoo » et au temps de l’égalité revendiquée en tout point.

Notez déjà que la nouvelle traduction, celle que nous avons entendue ce matin est nettement meilleure que l’ancienne. Elle commence par « soyez soumis les uns aux autres » et non pas par « femmes, soyez soumises à vos maris » qu’on entendait il y a encore quelques années.

Heureusement qu’on a abandonné cette formulation car le texte de Paul est égalitaire, il nous demande bien d’être soumis les uns aux autres, sans distinction, hommes et femmes, à l’intérieur du couple.

Mais il reste la deuxième phrase qui vous a peut-être chatouillé au passage, Mesdames : « pour la femme, le mari est la tête ». Ça, c’est resté dans la nouvelle traduction !

Ça vous choque ? Moi, oui, hein ! Dit comme ça, sorti de son contexte, oui, hein, je vous rassure !

Est-ce que c’est mauvais d’être choqué ? Non, pas forcément… Faut-il tout plaquer dès qu’une phrase nous choque ? Certainement pas !

Cela vaut pour un livre autant que pour une relation, d’ailleurs. Pour ma part, avec les personnes que je nomme mes Amis, je parle vrai. Il arrive qu’on se heurte quand on parle vrai, qu’on se froisse entre Amis, c’est normal. Mais ce n’est pas pour cela que l’Amitié disparaît, vous en faites la même expérience, Chers Amis. Au contraire d’ailleurs, c’est une marque d’Amitié que d’être authentique avec l’autre.

Et au passage, l’Evangile que nous avons entendu juste après cette deuxième lecture nous rappelait que Jésus lui-même avait de ces phrases qui choquaient, qui heurtaient son auditoire.

Ça faisait d’ailleurs fuir certains de ses disciples, vous l’avez entendu… qui n’étaient donc pas ses Amis, par définition…

Et il dit à ses disciples, vous l’avez aussi entendu : ça vous choque ? vous voulez cesser de me suivre ? ok, allez-y, partez…

Et Pierre de répondre : mais Seigneur, ce n’est pas parce que c’est choquant qu’il faudrait pour autant s’en aller, voyons ! Tu as les paroles de la vie éternelle !

Sous-entendu : c’est pas bisounours, la vie éternelle, ça peut être des paroles de feu ! Et ce n’est pas pour cela qu’il faudrait y renoncer !

Ce qui est choquant n’est donc pas forcément mauvais. Il faut accepter d’être dérangé de nos habitudes confortables, pour suivre le Christ.

Mais pour bien comprendre, revenons à notre cordée d’il y a quelques instants, voulez-vous ? Reprenons l’image dans notre tête, vous l’avez ? Cette cordée qui chemine…

Maintenant imaginez deux secondes qu’il y ait DEUX alpinistes à la tête de la cordée…

Impossible ! Impossible, totalement exclu, n’importe quel guide de montagne vous le dira : si vous mettez deux personnes en tête de la corde, si ces deux-là chutent, elles entraînent toute la cordée. Exclu ! il n’y a jamais qu’une seule personne en tête de la corde, et pour cause : il ne peut pas y avoir deux têtes.

Or, j’aime bien voir la famille comme une cordée, personnellement. C’est une image qu’on utilisait souvent dans ma famille. Et je crois qu’il y a de cela, quand on y réfléchit un peu. Pour s’avancer ensemble sur le glacier escarpé de l’existence, on s’est encordés. On a le même nom, la même maison, le même idéal, les mêmes valeurs, c’est ça une famille et c’est ça la corde qui nous lie.

Et c’est ça qui va nous aider à comprendre l’expression de Paul : « pour la femme le mari est la tête ».

D’abord écartons une mauvaise compréhension, il ne s’agit pas de la tête qui pense.

Non, Paul n’est pas en train de dire que le mari réfléchit et que la femme exécute – je connais d’ailleurs bon nombre de couples où c’est plutôt la femme qui réfléchit, hein… mieux que le mari, pardonnez-moi !

Ce n’est pas cela, la tête selon Paul. C’est le premier de cordée, la tête de la marche. Et, dans une cordée, au passage, le premier c’est celui qui prend les plus grands risques, hein, c’est pas aisé d’être le premier de cordée, demandez à n’importe quel guide il vous le confirmera.

Dans une famille il faut un premier de cordée.

Mais reprenez l’image de votre cordée sur son glacier en montagne. Je vous ai dit qu’il y avait des hommes et des femmes… mais je ne vous ai pas précisé qui était en tête.

Toute la différence de notre époque contemporaine par rapport au monde antique dans lequel écrivait Paul, c’est bien qu’aujourd’hui une femme peut tout à fait être première de cordée, Dieu merci.

Et si Paul avait vécu aujourd’hui il aurait nécessairement ajouté une note encore plus égalitaire à ce texte. Rappelant que la femme peut aussi être la tête pour son mari, elle peut aussi être première de cordée.

Mais l’égalité, Chers Amis, ce n’est pas de faire tous exactement la même chose. Toute la cordée ne peut pas ensemble se retrouver en tête, la neige cède, automatiquement. Et ça n’aurait aucun sens de faire tous, ensemble, la même chose ! ce n’est pas ça l’égalité !

L’égalité c’est que chacun puisse jouer à son tour le rôle de l’autre. Avec ses spécificités propre.

Dans le couple, c’est un subtil équilibre qui fait que l’un ou l’autre prend le rôle de premier de cordée, alternativement, régulièrement. Mais jamais les deux en même temps, sans quoi rien ne va plus dans la cordée. Les parents qui sont ici le savent parfaitement.

Et le premier de cordée tient au reste de la cordée comme à son propre corps car ce sont précisément les autres qui vont sauver son corps s’il vient à tomber dans une crevasse.

Quand Paul dit que l’homme doit aimer sa femme comme son propre corps, vous avez mieux l’image, là… c’est le reste de la cordée qui va sauver le corps du premier de cordée, s’il tombe.

Restent encore les crampons qui aident la cordée à tenir sur son glacier.

Et ça c’est une image de la foi, je crois. C’est elle qui nous fait tenir bon.

On peut être encordés par le plus bel amour familial qui soit, ce n’est pas encore cela qui nous empêchera de glisser, c’est la foi que nous mettons en Dieu qui, en fait, est lui le véritable premier de cordée, bien sûr.

Le Seigneur qui veille sur chacun des membres de la cordée, qui veille sur chacun de nos os, comme le disait le psaume, pour toute personne qui trouve en lui son refuge.

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Les Plans sur Bex, dimanche 22 août 2021, 11.45




Estelle et Jérémie

Estelle et Jérémie

avec leurs témoins Joëlle et Nicolas

L’Aprily, samedi 21 août 2021




Estelle et Jérémie – Homélie de Mariage

Homélie pour le

Mariage d’Estelle et Jérémie

Ct 2,8-10.14-16a; 8,6-7a – Ps 148 – Mt 7,21.24-25

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Quand on est dessinateur en bâtiment, Cher Jérémie, il vaut mieux dessiner du solide. Et c’est ce qu’il fait !

Par conséquent mieux vaut s’inquiéter aussi de savoir sur quel sol notre bâtiment va reposer, bien sûr.

Si c’est du sable, pas certain que ça tienne bien longtemps, cette affaire ! Au premier été un peu pourri – je dis ça sans aucune allusion quelconque, hein ! – le bâtiment s’écroulera comme un château de cartes.

Quand on construit sur du solide, sur du roc, alors là par contre il y a de fortes chances que ça tienne et que le bâtiment survive à toutes sortes de tempêtes, prévisibles ou non.

C’est ce que nous disait Jésus dans L’Evangile, que vous avez choisi de nous faire partager, qu’on vient de réentendre. Jésus qui ne connaissait pas, pourtant, ce merveilleux dessinateur en bâtiment qu’est Jérémie.

Mais Jésus parlait-il vraiment de bâtiments ? Pas sûr.

D’abord, vous n’avez pas entendu le mot « bâtiment » dans ce texte, mais bien le mot « maison ». Vous me direz : « Oui, mais enfin, bon… une maison, c’est un bâtiment ! »

Oui, mais Jésus parlait hébreu, vous le savez bien. Or l’hébreu, c’est une langue qui ne fonctionne pas du tout par concepts comme nos langues à nous, notamment en Europe. L’hébreu, c’est une langue qui utilise des images.

Et par exemple, en hébreu, il n’y a pas de mot pour dire « famille »… Le mot « famille » n’existe pas en hébreu. On utilise une image pour dire la famille : la famille, c’est l’ensemble de celles et ceux qui habitent sous un même toit dans l’esprit hébraïque. Et donc, pour dire « famille » dans la langue de Jésus, on utilise – figurez-vous – le mot… « maison ».

Alors évidemment ça offre une lecture de notre Evangile beaucoup plus large. Celui qui construit sa maison sur du solide c’est celui qui construit sa famille sur du solide. Les tempêtes de la vie pourront souffler, sa famille restera ancrée sur ses bases, unie.

Et c’est sur du solide que vous construisez votre famille, Estelle et Jérémie. Je ne parle pas seulement du terrain sur lequel vous logez et qui est déjà du solide ! Je parle de vos valeurs : la confiance, la fidélité – pas seulement à l’autre, la fidélité à soi-même aussi et à Dieu, puisque vous êtes venus lui confier votre amour ici, aujourd’hui. La complicité, l’humour…

Humour et amour sont deux mots qui riment et ce n’est pas un hasard, je crois ! Il faut de l’humour pour que l’amour dure, bien souvent. De l’humour face à soi-même d’abord, de fait, et face aux petits défauts de l’autre aussi, qui – celles et ceux qui sont jeunes depuis plus longtemps que les autres ici vous le diront – ces petits défauts qui ne vont jamais en disparaissant avec le temps plutôt en augmentant, en général…

Vous construisez sur du solide et cela vous protège des tempêtes de l’existence. Ce n’est pas moi qui le dis, c’est Jésus. C’est donc du solide.

Or des tempêtes, il y en aura. Il y en a déjà eu. Pensons au CoVid par exemple. C’est le 11 juillet de l’an dernier que nous étions censés nous rassembler ici… et c’est depuis le 14 octobre 2019 que vous me supportez pour préparer ce mariage.

Vous auriez pu laisser tomber. D’ailleurs je connais des couples ont laissé tomber, qui ont repoussé leur cérémonie religieuse à quand ce serait le moment, quand tout ça sera terminé, autant dire quand les poules auront des dents !

Vous avez persévéré : « Non, on y arrivera, on va le célébrer, ce mariage ! » Et on est là, aujourd’hui.

Persévérer, c’est essentiel, dans la vie.

À la SUVA, même si Estelle ne voit pas forcément les progrès des patients au jour le jour aussi bien qu’un médecin ou qu’un physio, à la SUVA si on laisse tomber on ne remarche plus, ou on reste paralysé. Je peux vous le dire, j’en sais quelque chose je suis passé par là. Les tempêtes de nos vies nous offrent quantité de moments où l’on est tenté de laisser tout tomber.

Mais si l’on persévère… et si l’on persévère avec Dieu, alors il y a de fortes chances pour que ce qui nous paraissait impossible au départ se réalise !

Et quand on bâtit sur du solide, jusqu’à l’intérieur de nous-mêmes, et la Foi c’est ça, c’est du béton armé quand on a eu la chance de la recevoir dans notre famille, quand on la cultive, quand on la transmet à notre tour, quand on bâtit comme vous deux sur des valeurs solides, alors toutes les tempêtes de l’existence peuvent s’abattre sur nous sans que rien ne s’effondre jamais.

Mais je vous souhaite bien sûr plutôt du beau temps, comme aujourd’hui, au lieu des tempêtes. Je vous souhaite des paysages magnifiques au cours de votre vie, une nature préservée, comme celle que nous contemplons au cœur de ces montagnes que vous aimez tant et que la première lecture que nous a partagée Noé – le Cantique des Cantiques, nous décrivait si bien.

Puissiez-vous avoir toute la douceur, toute la tendresse qui se trouvent dans ce texte… la douceur du bien-aimé, la tendresse de la bien-aimée pour que votre amour, flamme divine, ne soit jamais emporté ni par les torrents ni par quoi que ce soit d’autre !

Que cet Amour, aussi fort que la mort, comme le disait aussi le texte, dure jusqu’à la mort.

Ainsi vous pourrez louer le Seigneur toute votre vie, comme nous l’avons si bien si bien entendu dans le psaume.

Longue vie à tous les deux, Estelle et Jérémie !

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Notre-Dame de Crêta-d’Asse, l’Aprily (Crans-Montana, VS)

Samedi 21 août 2021




Olivia et Thomas

Olivia et Thomas

avec leurs témoins Myriam et Xavier

Fontenay-Mauvoisin (Yvelines, France), vendredi 20 août 2021




Olivia et Thomas – Homélie de Mariage

Homélie pour le

Mariage d’Olivia et Thomas

1Co 12,31-13,8a – Ps 102(103) – Mt 22,35-40

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Vous savez,

À chaque fois que je recevais des nouvelles d’Olivia, ou que je voyais des photos sur les réseaux sociaux, ça provenait toujours d’un pays que je ne connaissais pas, ou d’une région totalement improbable, là-bas, quelque part de l’autre côté de ce petit globe sur lequel nous vivons… et qu’elle a parcouru dans tous les sens.

On dit que le seul nombre qui est inconnu de Dieu c’est la somme de toutes les congrégations religieuses différentes qui existent dans le monde – tant il y a de branches, de familles, de subtiles subdivisions… mais je crois qu’il y a un autre nombre que même Dieu ne connaît pas, c’est l’ensemble des pays, des régions, des villes, des villages visités par Olivia… ça je pense que c’est trop fort pour lui !

Alors quand elle m’a appris qu’elle épousait un Parisien… qui ne sortait quasi jamais même pas de sa ville mais de son arrondissement… là je me suis dit : Seigneur, je te savais capable de grandes choses mais à ce point !

Et puis je me suis dit : on a gagné aux tirs aux buts, bon, d’accord, mais fallait-il vraiment infliger au peuple français une humiliation supplémentaire en allant leur piquer un Parisien pur sucre pour l’emmener en Suisse ?

(Oui parce que Thomas ne le sait pas encore, mais tôt ou tard il suivra Olivia partout où elle ira)

Et puis en y réfléchissant mieux, je me suis dit que c’était parfaitement logique, au fond. Pour que cette improbable rencontre – qui a commencé sur écran rappelons-le – pour que ce coup de foudre devienne grand feu de joie et qu’il produise des braises qui dureront toute la vie, il fallait forcément qu’il y ait Dieu.

Puisque Dieu est Amour, il est cette force incroyable qui déplace les montagnes, même les montagnes suisses, jusque dans le 15e arrondissement de Paris. Et j’aime mieux vous dire que c’est du lourd, hein !

Vous aimez Dieu, tous deux. Ça je peux le dire. Il fait partie de vos valeurs profondes, de votre identité même.

Alors posons-nous la question : aimer Dieu, qu’est-ce que cela signifie ? L’extrait d’Evangile que vous avez choisi de nous faire entendre le disait parfaitement : cela signifie aimer son prochain.

Ah oui… si j’ai bien compris le texte de Matthieu que nous venons de réentendre, c’est tout à fait clair : le premier commandement d’après Jésus c’est tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit, et le second commandement qui lui est semblable dit Jésus – donc qui lui est lié, qui a la même force – c’est tu aimeras ton prochain comme toi-même.

Les deux commandements sont donc liés.

On ne peut pas aimer Dieu sans aimer son prochain. Et vice versa. Si on fait du bien à son prochain, c’est une façon d’honorer Dieu. Il y a donc bien des gens qui honorent Dieu sans le savoir… en témoignant de l’amour pour leur prochain.

L’Amour, l’entraide, l’Amour du prochain, cela fait partie de votre vie, de vos valeurs.

Mais Jésus allait BEAUCOUP plus loin.

Aime ton prochain COMME TOI-MÊME, disait Jésus.

Et là cette fois, c’est l’esprit helvétique qui en prend un sacré coup. Parce qu’en Suisse, vous savez, on a une culture de l’humilité tout à fait excessive par rapport à la France qui cultive… pas le contraire de l’humilité, non, quand même… mais pas loin, parfois.

En Suisse, on a une nette tendance à l’autoflagellation et au dénigrement personnel. On nous remercie pour quelque chose ? – Oh c’est rien ! répondons-nous.

Bah non ce n’est pas RIEN. C’est très violent de répondre « c’est rien » !

–      Magnifique, cette tarte aux pommes, grand-maman !

–      C’est rien ma chérie !

Bah non c’est pas rien. C’est une tarte aux pommes, d’abord, c’est pas « rien ». Et ensuite elle ne contient pas que des pommes mais tout l’amour que la cuisinière a mis avec. C’est loin d’être « rien ».

Il y a donc un juste milieu à trouver entre le côté français qui va décréter que c’est la meilleure tarte du monde, forcément, et le côté suisse qui va dire « c’est rien »…

Aime ton prochain COMME TOI-MÊME.

Ça veut dire que si tu te dénigres toi-même, c’est ainsi que tu risques de traiter ton prochain.

Mais si tu te plantes devant le miroir chaque matin en disant : « Je suis le plus beau, le plus fort, le meilleur », tes relations avec les autres ne seront pas forcément très saines non plus.

Il y a un juste milieu, un juste équilibre à trouver, dans le couple comme ailleurs.

Comme en justice, avec cette balance…

Un peu de « suissitude » à mettre dans la « francitude », et un peu de nationalisme français dans le fédéralisme helvétique.

Il s’agit d’arriver à l’heure… mais pas trop.

Un peu de légalisme, Monsieur, mais un peu de diplomatie aussi, Madame…

Cet équilibre construit, constitue votre couple.

L’équilibre et les clins d’oeil de la Providence… dans ce cas on dit des clins-Dieu, d’ailleurs. Parmi tous les clins-Dieu qui émaillent votre vie jusqu’à ce jour, il en est un que vous n’avez pas vu venir… et que vous ne connaissez probablement même pas encore. L’Evangile que vous avez choisi, figurez-vous, c’est celui que la liturgie catholique propose à tous – tous ! – les croyants le vendredi de la 20e semaine du temps ordinaire les années impaires… c’est l’Evangile d’aujourd’hui, eh oui !

Après tout le gymkhana qu’il a fallu pour arriver à cette date et en ce lieu, avouez que c’est tout de même assez fort de café !

Ceci dit, l’Amour n’est pas qu’un subtil équilibre. Il est aussi, et même souvent, quelque chose d’excessif, d’absolu, et c’est aussi cela que nous propose le Dieu de tendresse que décrivait l’auteur du psaume que vous avez choisi.

Et cet Amour excessif culmine dans l’extrait de la lettre aux Corinthiens qu’Elisa nous a lu il y a quelques minutes.

Laissez-moi vous redire, Olivia et Thomas, le programme de ces prochaines années :

L’amour prend patience…

L’amour rend service…

L’amour ne jalouse pas…

L’amour ne se vante pas…

L’amour ne se gonfle pas d’orgueil…

L’amour ne fait rien d’inconvenant…

L’amour ne cherche pas son intérêt…

L’amour ne s’emporte pas…

L’amour n’entretient pas de rancune…

L’amour ne se réjouit pas de ce qui est injuste…

L’amour trouve sa joie dans tout ce qui est vrai…

L’amour supporte tout…

L’amour fait confiance en tout…

L’amour espère tout…

L’amour endure tout…

« Vaste programme », comme aurait dit l’autre…

Et si vous appliquez tout cela, alors – et alors seulement – la dernière phrase de l’extrait de St Paul se vérifiera : l’amour – votre amour, Olivia et Thomas – ne disparaîtra jamais.

Longue vie à tous les deux !

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Eglise St Nicolas de Fontenay-Mauvoisin, Yvelines, France




Une petite jeune fille de là-bas…

Photo : capture d’écran depuis tvn.cl

 

Homélie pour la solennité de L’ASSOMPTION

avec aussi le baptême de la petite Emy

Lectures : 1Chroniques 15,3-4 ;15-16 ;16,1-2

Ps 131 / 1Corinthiens 15,54b-57 / Lc 11,27-28

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Je pourrais faire avec vous, Chers Amis, la liste des nationalités qui se trouvent ici, dans l’Eglise aujourd’hui, et je pense qu’on y passerait un certain temps !

Et si vous voyagez un peu – oh, en temps de CoVid c’est évidemment difficile mais… – si vous voyagez un peu et que vous cherchez, dans le pays où vous vous trouvez, la représentation d’une crèche – pas une crèche pour garder les enfants comme Emy, hein, une crèche de Noël – eh bien suivant le pays où vous vous trouvez, vous aurez sous les yeux quelque chose de radicalement différent.

Si vous allez dans le grand Nord, vous trouverez Marie avec des moufles, une crèche avec de la neige sur le toit, des bergers avec de solides peaux de mouton pour se tenir chaud.

Si vous allez dans le sud, vous trouverez des crèches avec une Marie à la peau basanée, certainement les cheveux noirs, un costume typique des Andes si vous êtes en Amérique du Sud, ou bien la crèche sera une case en torchis si vous êtes en Afrique, bref : tout est à l’avenant suivant le pays où vous vous trouvez.

Et c’est bien normal parce qu’on aime représenter la sainte famille comme une famille de chez nous, d’où que l’on soit. C’est une manière que nous avons de nous rapprocher un peu de cette famille, de la représenter comme les familles de chez nous.

Alors je vous propose un exercice très simple, Chers Amis, je vais vous demander de fermer les yeux quelques instants…

…allez-y, fermez les yeux… ne vous endormez pas ! …et essayez d’imaginer Marie… Marie telle que vous la connaissez bien sur un de ces tableaux, un de ces vitraux, une de ces statues…

Marie est là, les mains jointes, la tête un peu penchée, elle est grande, elle est habillée en bleu et en blanc, peut-être y a-t-il un peu de rose aussi, sur sa robe… toutes les couleurs sont pastel, elle a les cheveux blonds, de longs cheveux blonds, les yeux bleus…

Stop, arrêtez, rouvrez les yeux ! C’est pas ça, Marie, hein ! Ça, c’est pas Marie ! Ça, c’est la « Marie » de l’Occident, telle qu’on la représente ici, volontiers, sur des tableaux. Mais c’est pas Marie, ça…

Marie blonde aux yeux bleus, la peau laiteuse et en robe aussi blanche que la neige, ça, c’est la Marie des Européens… mais ce n’est pas Marie ! Une femme de Judée, de Galilée, de Palestine, de là-bas…

Vous avez souvent vu des blondes, vous, là-bas ? Il y en a, hein… mais il n’y en a pas beaucoup !

Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, je n’ai rien contre les blondes ! Certains de vous le savent, avant d’être prêtre j’ai eu la chance d’être fiancé, et j’étais fiancé à une jeune femme qui était blonde et qui avait de longs cheveux blonds, en plus ! Je les apprécie !

Mais il y a fort à parier, Chers Amis, que Marie devait avoir les cheveux plutôt sombres. Et quant à sa peau… Marie n’avait évidemment pas la peau blanche comme la nappe de cet autel ! Ah si vous regardez certains tableaux, c’est édifiant ! Blanche-Neige, à côté, elle est bronzée, hein !

Mais Marie n’était pas comme ça, Marie est une femme de là-bas, elle avait la peau tannée – si ce n’est par le soleil encore plus par les grains de sable du désert, bien sûr !

Quant à sa robe… si par chance elle a un jour reçu une robe blanche ou rose bonbon ou bleu-ciel, cette robe a dû être très-très rapidement brunie par sable du désert. Là-bas, on a plutôt des habits qui tirent sur le beige ou sur le brun, au fur et à mesure des années, c’est bien logique.

Vous voyez, Chers Amis, quand on essaie d’imaginer Marie, c’est humain, on l’imagine comme quelqu’un de chez nous.

Mais essayons de lui redonner sa véritable apparence… celle qu’elle était réellement. Cette petite jeune fille qui, lorsqu’elle a été promise en mariage, était encore adolescente, vous le savez.

Cette petite jeune fille probablement aux cheveux sombres, à la peau tannée.

Cette petite jeune fille juive – ce n’est pas interdit de le redire, hein ! – cette petite jeune fille qui chantait, qui dansait les chants et les danses de son pays, qui allait à la synagogue comme nous allons à l’Eglise.

Cette jeune fille de sa culture à elle, de sa religion juive à elle.

C’est elle, Marie.

Rendons-lui son visage, nous le lui avons trop souvent volé pour la représenter comme nous, nous en avions envie. Rendons-lui son visage en ce jour de sa fête.

Et puis ne cherchons pas trop à expliquer les mystères qui entourent la vie de Marie…

« L’Assomption »… Le texte officiel de l’Eglise proclamé en 1950 dit qu’ « elle n’a pas connu la dégradation du tombeau »… ça dit tout et ça dit rien : est-ce qu’elle est morte ? C’est pas dit. Est-ce qu’elle n’est pas morte alors ? C’est pas dit non plus. Elle n’a pas connu la dégradation du tombeau, pour le reste : mystère.

Et je crois qu’il y a des mystères qu’il faut savoir ne pas expliquer. Marie en fait partie.

Elle est un personnage universel, vous le savez bien, Chers Amis : elle était Juive, elle est citée dans le Coran des Musulmans et elle nous rassemble, nous, les Chrétiens.

C’est rare, un personnage qui rassemble trois grandes religions !

Elle est un personnage universel particulièrement en Europe, vous le savez aussi, puisque les douze étoiles du drapeau européen et la couleur bleue viennent de la médaille miraculeuse de Marie, selon le concepteur de ce drapeau.

Marie est un personnage qui rassemble, mais il faut avoir la sagesse de ne pas tout expliquer ce qu’il y a autour d’elle.

Elle fut la demeure de Dieu – comme Marie-Jeanne fut la demeure d’Emy : eh oui, pendant quelques mois nos Mamans sont nos demeures ! Elle fut la demeure de Dieu, comme le disait le psaume.

Elle fut l’arche d’Alliance, puisqu’elle a contenu Dieu… l’arche dont nous parlait la première lecture. Elle fut heureuse, certainement, comme le disait l’Evangile. Elle a suivi Dieu aussi et essayé d’obéir à ses paroles qu’elle avait entendues. Et comme le disait aussi notre deuxième lecture, elle a vaincu la mort en revêtant l’immortalité.

Ça, ce sont des points que l’on peut dire en se basant sur nos lectures.

Mais pour le reste, il vaut mieux se taire et la prier, notre Maman du Ciel.

Emy apprendra, elle aussi, qu’elle a non seulement une Maman sur la terre mais comme Chacune, Chacun de nous, une Maman là-haut à qui elle peut aussi confier certaines choses.

Bien malin qui peut dire ce qu’il y a dans le cœur d’une Maman, à fortiori dans celui de Marie.

Alors se taire, Chers Amis, c’est ce que je vous invite à faire maintenant… pour que nous puissions imaginer Marie non pas telle qu’on l’a trop souvent représentée mais Marie telle qu’elle fut, telle qu’elle est, telle qu’elle sera, aujourd’hui, demain et dans l’éternité.

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Bex, samedi 14 août 2021, 18.00

Aigle, dimanche 15 août 2021, 10.00 (version enregistrée)




Se désaltérer

Photo libre de droits : pixabay

Se désaltérer

L’été est propice à la soif, pas seulement spirituelle, mais bel et bien simplement charnelle. Il fait soif dans les chaudes journées de cette saison où les jours nous gratifient de longs moments ensoleillés – quand la météo ne devient pas complètement folle, comme cela peut aussi nous apparaître cette année!

«Comme un cerf altéré cherche l’eau vive» dit le psaume 41, ou bien encore «Dieu, tu es mon Dieu, je te cherche dès l’aube: mon âme a soif de toi; après toi languit ma chair, terre aride, altérée, sans eau.» dit le psaume 62 bien connu de celles et ceux qui prient la liturgie des heures puisqu’il revient à chaque solennité.

Mot en commun dans ces deux versets: l’adjectif «altéré». Un terme très souvent mis en lien avec la soif puisque l’apaisement de cet état s’appelle «se désaltérer»

«Redevenir soi-même»

A l’occasion d’une rencontre avec un confrère à Lourdes – ville d’eau s’il en est – il me rappelle que le terme «désaltérer» signifie d’abord «ne plus être autre». En effet: «alter» en latin, c’est «l’autre». Etre «altéré», c’est se trouver dans une telle situation de détresse qu’on en devient presque «un autre». Et par conséquent, se «dés-altérer» c’est redevenir soi-même.

Que cet été nous soit propice à redevenir nous-mêmes, à nous désaltérer à coup de grands verres d’eau ou simplement en s’abreuvant à la Source qu’est la Parole de Dieu!

Bel été à Chacune et à Chacun!

 

Vincent Lafargue | 9 août 2021

pour le site www.cath.ch




Les Anges de nos déserts…

Image libre de droits : pixabay

Homélie pour le 19e dimanche TO, année B

1Rois 19,4-8 / Psaume 33(34) /  Ephésiens 4,30-5,2 / Jean 6,41-51

 

> Une homélie n’est faite ni pour être lue ni pour être vue en vidéo, c’est un exercice oral. Vivez l’expérience pleinement en l’ECOUTANT :

 

Chers Amis,

 

Laquelle d’entre vous, Mesdames, lequel d’entre vous, Messieurs, n’a jamais – JAMAIS ! – été découragé ?

…Je vois qu’il n’y a aucune main qui se lève…

…Personne ! Vous comme moi, ça nous est arrivé, c’est humain. Dire « Je n’en peux plus ! », c’est humain, ça nous arrive, selon les moments. Et quand on voit la pluie tomber depuis plusieurs jours, ça peut nous arriver !

Et face au découragement, nous le savons bien, on peut même aller très loin, on peut vouloir partir très loin. On peut même en arriver à souhaiter mourir, lorsqu’on est découragé…

C’est exactement ce qui arrive à Elie, le prophète dans notre première lecture que nous a lue Carlo.

Pourtant c’est un prophète ! On se dit, peut-être, que comme prophète, il a reçu une force supplémentaire… Non. Lui aussi, il est découragé. Et même… il veut mourir.

Dans l’histoire d’Elie, peut-être aussi parce que le prophète a mis le Seigneur au défi, vous l’avez entendu – « Seigneur, reprends ma vie », a dit Elie – dans l’histoire d’Elie, un ange s’approche de lui pendant son sommeil, dans le désert… L’ange le réveille et lui montre de quoi continuer sa route.

Pour Elie c’était de la nourriture.

Le psaume le disait à sa manière aussi : « L’ange du Seigneur campe alentour pour libérer ceux qui le respectent. »

Alors vous me direz que c’est facile de prétendre qu’un ange va venir nous sauver dans les déserts de notre vie ! Des fois, on aimerait bien qu’il soit un peu plus visible, l’ange !

Quand on traverse un deuil, l’ange ne va pas faire revenir la personne décédée. Quand on en est à la 500e lettre de demande d’emploi et que l’on ne reçoit que des refus, les rares fois où l’on reçoit une réponse… bah l’ange du Seigneur, il nous fait une belle jambe !

Mais ça c’est parce que, Chers Amis, on a toujours envie, nous, les humains, d’un ange à la Harry Potter…

Un ange avec une baguette magique qui viendrait comme ça [claquement de doigt] d’un coup de baguette régler tous nos problèmes.

Des fois, on croit même que Dieu est comme ça. C’est ce qui nous fait dire : « Bah alors, s’il est tout puissant, pourquoi est-ce qu’il y a le mal dans le monde ? Il pourrait tout régler ! »

Mais ce n’est pas Dieu, ça, c’est Superman ! ça n’a rien à voir ! Et ce n’est pas un ange non plus !

Nous serions de pauvres marionnettes si nous dépendions d’un Dieu qui, finalement, règlerait toute notre vie sans que nous soyons nous-mêmes libres de le faire… C’est bien le problème de Dieu, notre libre-arbitre !

Et ce n’est pas ce que fait le Seigneur, de nous manipuler comme des marionnettes… ce n’est pas non plus ce que fait l’ange dans l’histoire d’Elie. Vous l’avez entendu, d’ailleurs, l’ange commence par dire à Elie : « Lève-toi ! »

Ah oui ! Quand on est dans les problèmes, Dieu commence par nous demander un effort. « Lève-toi ! »

Il ne commence pas par lui dire : « Oh mon pauvre Elie, c’est difficile, ce que tu vis, je vois que tu n’es pas bien… je vais pleurer avec toi… »

Non… il lui dit : « Lève-toi ! »

Et le Seigneur commence par nous dire, au fond de nos deuils, au fond de nos douleurs, au fond de nos maladies, au fond de nos souffrances, au fond de nos pandémies, au fond de nos problèmes, il commence par nous dire : « Lève-toi ! Ensuite on verra… mais d’abord lève-toi ! »

« Ne reste pas au fond du trou, arrête de broyer du noir, arrête de te lamenter. Lève-toi ! Oui, c’est difficile, mais commence par te lever ! »

Quand il y avait des problèmes, ma grand-maman disait qu’il ne sert à rien de pleurer sur le lait renversé…

Eh oui, ça ne sert à rien, il est renversé ! Il vaut mieux se mettre à nettoyer plutôt que de pleurer sur le lait renversé ou de se servir toutes les insultes de la terre, on est très forts pour ça aussi : « Ah quel idiot je fais, pourquoi j’ai renversé ce verre ! » …ça ne sert à rien non plus, hein, ça ne va pas faire remonter le lait dans le pot.

Pourtant ça nous arrive, dans nos vies, de se lamenter. Mais ça ne fait pas avancer les choses. Au contraire, souvent : ça nous enlève le peu d’énergie qu’on avait encore.

« Lève-toi ! », dit l’ange.

Et vous savez, Chers Amis, les anges parfois n’ont pas d’ailes. On les appelle des AMIS. On en a beaucoup, dans nos vies, on en a beaucoup !

Posons-nous la question : qui sont les anges de nos vies ? Laissons passer leurs visages dans nos têtes quelques instants… ces personnes que nous connaissons bien, qui sont toujours là quand ça va mal, souvent pile au bon moment… Qui sont ces personnes qui nous disent : « Oui, c’est difficile, ce que tu traverses, mais lève-toi, courage ! »

Ces personnes sont nos anges, à leur manière…

Mais il ne suffit pas de dire « lève-toi », vous l’avez entendu, l’ange du Seigneur donne quelque chose à Elie. Il lui donne à manger. Oh pas grand-chose ! Une galette et un peu d’eau. Il ne va pas aller loin, avec ça, Elie ! En plein désert… une galette et un peu d’eau !

D’ailleurs, après avoir mangé, que se passe-t-il ? Il se rendort ! Ça devait pas tout à fait être une barre d’Ovomaltine !

Une galette et un peu d’eau… C’est pas grand-chose, mais c’est déjà ça !

Alors posons-nous la question au sujet des anges de nos vies, Chers Amis : qui sont les gens autour de nous qui, au beau milieu de nos problèmes, non seulement nous redonnent du courage en nous disant « lève-toi ! » mais nous apportent un petit quelque chose, pas grand-chose… mais un petit bout de solution.

Ce n’est pas une baguette magique, non… C’est une galette… un peu d’eau… c’est un regard, c’est un coup de téléphone, c’est un petit message, c’est une main sur l’épaule… c’est rien et c’est tout, en même temps.

C’est peut-être le déclic qui va nous aider à nous relever une seconde fois.

Car l’ange réveille à nouveau Elie, dans notre histoire, lui redonne à manger et le remet en route en lui disant : « Le chemin qui te reste est long à parcourir. Alors vas-y, maintenant ! »

Et là aussi, remarquez bien que l’ange est honnête. Il aurait très bien pu dire à Elie : « Marche, tu verras c’est juste là, après le virage, là-bas… » L’ange est honnête, il lui dit : « Non, le chemin qui te reste à parcourir est long, alors vas-y, en route ! »

A une personne en deuil, il ne sert à rien de dire que ça va passer, comme ça, dans une semaine, c’est faux. Autant être honnête et lui dire que ce sera long, comme l’ange l’a dit à Elie. Autant lui dire : « Reprend ton chemin, je suis avec toi dans ce que tu traverses. »

Et à l’inverse, c’est pas pour ça non plus qu’il faudrait dire à une personne en deuil : « Ben oui, tu as raison, c’est trop dur, alors couche-toi, hein, laisse-toi mourir toi aussi. Ça ira beaucoup mieux. » Bah non, ça ira pas mieux !

Les anges de nos vies, chers Amis, je crois que nous avons, Chacune, Chacun, plusieurs si nous cherchons bien.

Ils sont autant de visages du Christ sur nos chemins de vie, car le Christ est le pain de vie, il le disait dans l’Evangile. Il est celui qui nous aide à avancer dans les déserts de nos problèmes.

Nous qui avons l’Esprit-Saint en nous de par notre baptême, ne l’attristons pas, comme disait Paul dans la deuxième lecture.

Faisons-lui honneur, à cet Esprit, cette force immense qui habite en nous. Appuyons-nous sur sa force – elle est considérable ! Elle permet de se relever et elle suscite des anges autour de nous.

Alors quel que soit notre désert – nous avons tous nos déserts, que ce soit celui de la tristesse, du deuil, de la souffrance, de la maladie, de la pandémie ou simplement de la pluie, des petits problèmes du quotidien ou des plus grands problèmes de l’existence – quel que soit le désert que nous traversons, il cache des anges.

Il cache une galette, un peu d’eau. Un regard. Une main tendue. Le pain de la vie.

Ou bien comme le disait, à sa manière, le Petit Prince : « Ce qu’il y a de beau dans le désert, c’est qu’il cache un puits, quelque part. »

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Les Diablerets, samedi 7 août 2021, 18.00 (version enregistrée)

Les Plans sur Bex, dimanche 8 août 2021, 11.45

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Et dans une version un peu différente, jadis :

La Sage, samedi 11 août, 20.00

La Luette, dimanche 12 août, 19.00

Pralong, samedi 8 août 2015, 18.15

La Sage, samedi 8 août 2015, 19.30

Evolène, dimanche 9 août 2015, 9.30